Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/334

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un peu considérable, et, si elle ne contient point du tout d’argent, ce n’est qu’une pyrite plutôt arsenicale que cuivreuse[1].

Pour donner une idée nette des travaux qu’exigent ces minerais de cuivre avant qu’on ne puisse les réduire en bon métal, nous ne pouvons mieux faire que de rapporter ici par extrait les observations de feu M. Jars, qui s’est donné la peine de suivre toutes les manipulations et préparations de ces mines, depuis leur extraction jusqu’à leur conversion en métal raffiné. « Les minéraux de Saint-Bel et de Chessy, dans le Lyonnais, sont, dit-il, des pyrites cuivreuses, auxquelles on donne deux, trois ou quatre grillages avant de les fondre dans un fourneau à manche, où elles produisent des mattes qui doivent être grillées neuf à dix fois avant que de donner par la fonte leur cuivre noir : ces mattes sont des masses régulines, contenant du cuivre, du fer, du zinc, une très petite quantité d’argent et des parties terreuses, le tout réuni par une grande abondance de soufre.

» Le grand nombre de grillages que l’on donne à ces mattes avant d’obtenir le cuivre noir a pour but de faire brûler et volatiliser le soufre, et de désunir les parties terrestres d’avec les métalliques ; on fait ensuite fondre cette matte en la stratifiant à travers les charbons, et les particules de cuivre se réunissent entre elles par la fonte, et vont par leur pesanteur spécifique occuper la partie inférieure du bassin destiné à les recevoir.

» Mais, lorsqu’on ne donne que très peu de grillages à ces mattes, il arrive que les métaux qui ont moins d’affinité avec le soufre qu’il n’en a lui-même avec les autres qui composent la masse réguline, se précipitent les premiers ; on peut donc conclure que l’argent doit se précipiter le premier, ensuite le cuivre, et que le soufre reste uni au fer. Mais l’argent de ces mattes paraît être en trop petite quantité pour se précipiter seul ; d’ailleurs il est impossible de saisir, dans les travaux en grand, le point précis du rôtissage qui serait nécessaire pour rendre la séparation exacte… et il ne se fait aucune précipitation, surtout par la voie sèche, sans que le corps précipité n’entraîne avec lui du précipitant et de ceux auxquels il était uni[2]. »

Ces mines de Saint-Bel et de Chessy ne contiennent guère qu’une once d’argent par quintal de cuivre, quantité trop petite pour qu’on puisse en faire la séparation avec quelque profit. Leur minerai est une pyrite cuivreuse mêlée néanmoins de beaucoup de fer. Le minerai de celle de Chessy contient moins de fer et beaucoup de zinc ; cependant on les traite toutes deux à peu près de la même manière. On donne à ces pyrites, comme le dit M. Jars, deux, trois et jusqu’à quatre feux de grillage avant de les fondre. Les mattes qui proviennent de la première fonte doivent encore être grillées neuf ou dix fois avant de donner, par la fusion, leur cuivre noir : en général, le traitement des mines de cuivre est d’autant plus difficile est plus long, qu’elles contiennent moins de cuivre et plus de pyrites, c’est-à-dire de soufre et de fer, et les procédés de ce traitement doivent varier suivant la qualité ou la quantité des différents métaux et minéraux contenus dans ces mines. Nous en donnerons quelques exemples dans l’énumération que nous allons faire des principales mines de cuivre de l’Europe et des autres parties du monde.

  1. Ces différentes mines de cuivre grises éprouvent dans le sein de la terre divers degrés d’altération, à proportion que leurs minéralisateurs se volatilisent ; elles passent alors par divers états successifs de décomposition, auxquels on a donné les noms de mine de cuivre vitreuse hépatique, violette ou azurée, de mine de cuivre vitreuse couleur de poix, d’azur et de vert de cuivre, de malachite, et enfin de bleu et de vert de montagne… Les couleurs rougeâtre, pourpre, violette, azurée, le chatoiement de l’espèce de glacé qu’on observe à la surface de la mine de cuivre hépatique, violette ou azurée, sont dues à la dissipation plus ou moins considérable des substances arsenicales et sulfureuses… Si la décomposition est plus avancée, les couleurs vives sont remplacées par une teinte d’un brun rougeâtre foncé. Idem, t. II, p. 364 et 365.
  2. Mémoires de l’Académie des sciences, année 1770, p. 434 et 435.