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alcalis fixes ou volatils, et même les substances calcaires : les précipités seront des poudres vertes, mais elles seront bleues si les alcalis sont caustiques, comme ils le sont en effet dans les matières calcaires lorsqu’elles ont été calcinées. Il ne faudra qu’ajouter à ce précipité ou chaux de cuivre, comme à toute autre chaux métallique, une petite quantité de matière inflammable pour la réduire en métal : et, si l’on fait fondre cette chaux de cuivre avec du verre blanc, on obtient des émaux d’un très beau vert ; mais on doit observer qu’en général les précipités qui se font par les alcalis ou par les matières calcaires ne se présentent pas sous leur forme métallique, et qu’il n’y a que les précipités par un autre métal où les résidus, après l’évaporation des acides, qui soient en effet sous cette forme, c’est-à-dire en état de métal, tandis que les autres précipités sont tous dans l’état de chaux.

On connaît la violente action du soufre sur le fer, et, quoique sa puissance ne soit pas aussi grande sur le cuivre, il ne laisse pas de l’exercer avec beaucoup de force[1] : on peut donc séparer ce métal de tous les autres métaux par l’intermède du soufre, qui a plus d’affinité avec le cuivre qu’avec l’or, l’argent, l’étain et le plomb, et, lorsqu’il est mêlé avec le fer, le soufre peut encore les séparer, parce qu’ayant plus d’affinité avec le fer qu’avec le cuivre, il s’empare du premier et abandonne le dernier. Le soufre agit ici comme ennemi ; car, en accélérant la fusion de ces deux métaux, il les dénature en même temps, ou plutôt il les ramène par force à leur état de minéralisation et change ces métaux en minerais ; car le cuivre et le fer, fondus avec le soufre, ne sont plus que des pyrites semblables aux minerais pyriteux, dont on tire ces métaux dans leurs mines de seconde formation.

Les filons où le cuivre se trouve dans l’état de métal sont les seules mines de première formation. Dans les mines secondaires, le cuivre se présente sous la forme de minerai pyriteux, et dans celles de troisième formation, il a passé de cet état minéral ou pyriteux à l’état de rouille verte, dans lequel il a subi de nouvelles altérations et mille combinaisons diverses par le contact et l’action des autres substances salines ou métalliques. Il n’y a que les mines de cuivre primitif que l’on puisse fondre sans les avoir fait griller auparavant : toutes celles de seconde formation, c’est-à-dire toutes celles qui sont dans un état pyriteux, demandent à être grillées plusieurs fois ; et souvent encore, après plusieurs feux de grillage, elles ne donnent qu’une matte cuivreuse mêlée de soufre, qu’il faut refondre de nouveau pour avoir enfin du cuivre noir, dont on ne peut tirer le cuivre rouge en bon métal qu’en faisant passer et fondre ce cuivre noir au feu violent et libre des charbons enflammés, où il achève de se séparer du soufre, du fer et des autres matières hétérogènes qu’il contenait encore dans cet état de cuivre noir.

Ces mines de cuivre de seconde formation peuvent se réduire à deux ou trois sortes : la première est la pyrite cuivreuse, qu’on appelle aussi improprement marcassite, qui contient une grande quantité de soufre et de fer, et dont il est très difficile de tirer le peu de cuivre qu’elle renferme[2] ; la seconde est la mine jaune de cuivre, qui est aussi une pyrite cuivreuse, mais moins chargée de soufre et de fer que la première ; la troisième est la mine de cuivre grise, qui contient de l’arsenic avec du soufre, et souvent un peu d’argent : cette mine grise paraît blanchâtre, claire et brillante lorsque la quantité d’argent est

  1. Les lames de cuivre stratifiées avec le soufre forment une espèce de matte aigre, cassante, de couleur de fer… Cette opération réussit également par la voie humide, en employant le cuivre en limaille, et en détrempant le mélange avec un peu d’eau. Éléments de chimie, par M. de Morveau, t. II, p. 53.
  2. La marcassite ou pyrite cuivreuse est très pauvre en métal de cuivre ; mais elle contient beaucoup de fer, de soufre, et quelquefois même un peu d’arsenic… Elle est si dure qu’elle donne des étincelles avec le briquet. Lettres de M. Demeste, t. II, p. 367.