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rouille, en grains, etc. Ce n’est donc que dans de certaines circonstances qu’il se forme du cuivre par cémentation dans l’intérieur de la terre : par exemple, il s’opère quelque chose de semblable dans la production de certaines malachites, et dans quelques autres mines de seconde et de troisième formation, où le vitriol cuivreux a été précipité par le fer, qui a, plus que tout autre métal, la propriété de séparer et de précipiter le cuivre de toutes ses dissolutions.

L’affinité du cuivre avec le fer est encore démontrée par la facilité que ces deux métaux ont de se souder ensemble : il faut seulement, en les tenant au feu, les empêcher de se calciner et de brûler, ce que l’on prévient en les couvrant de borax ou de quelque autre matière fusible qui les défende de l’action du feu animé par l’air ; car ces deux métaux souffrent toujours beaucoup de déchet et d’altération par le feu libre lorsqu’ils ne sont pas parfaitement recouverts et défendus du contact de l’air.

Il n’y a point d’affinité apparente entre le mercure et le cuivre, puisqu’il faut réduire le cuivre en poudre et les triturer ensemble fortement et longtemps pour que le mercure s’attache à cette poudre cuivreuse : cependant il y a moyen de les unir d’une manière plus apparente et plus intime ; il faut pour cela plonger du cuivre en lames dans le mercure dissous par l’acide nitreux ; ces lames de cuivre attirent le mercure dissous et deviennent aussi blanches, à leur surface, que les autres métaux amalgamés de mercure.

Quoique le cuivre puisse s’allier avec toutes les matières métalliques, et quoiqu’on le mêle en petite quantité dans les monnaies d’or et d’argent pour leur donner de la couleur et de la dureté, on ne fait néanmoins des ouvrages en grand volume qu’avec deux de ces alliages : le premier avec l’étain pour les statues, les cloches, les canons ; le second avec la calamine ou mine de zinc pour les chaudières et autres ustensiles de ménage : ces deux alliages, l’airain et le laiton, sont même devenus aussi communs et peut-être plus nécessaires que le cuivre pur, puisque dans tous deux la qualité nuisible de métal, dont l’usage est très dangereux, se trouve corrigée ; car de tous les métaux que l’homme peut employer pour son service, le cuivre est celui qui produit les plus funestes effets.

L’alliage du cuivre et du zinc n’est pas aigre et cassant comme celui du cuivre et de l’étain : le laiton conserve de la ductilité ; il résiste plus longtemps que le cuivre pur à l’action de l’air humide et des acides qui produisent le vert-de-gris, et il prend l’étamage aussi facilement. Pour faire du bon et beau laiton, il faut trois quarts de cuivre et un quart de zinc, mais tous deux doivent être de la plus grande pureté. L’alliage à cette dose est d’un jaune brillant, et, quoiqu’en général tous les alliages soient plus ou moins aigres, et qu’en particulier le zinc n’ait aucune ductilité, le laiton néanmoins, s’il est fait dans cette proportion, est aussi ductile que le cuivre même ; mais, comme le zinc tiré de sa mine par la fusion n’est presque jamais pur, et que, pour peu qu’il soit mêlé de fer ou d’autres parties hétérogènes, il rend le laiton aigre et cassant, on se sert plus ordinairement et plus avantageusement de la calamine, qui est une des mines du zinc ; on la réduit en poudre, on en fait un cément en la mêlant avec égale quantité de poudre de charbon humectée d’un peu d’eau ; on recouvre de ce cément les lames de cuivre, et l’on met le tout dans une caisse ou creuset que l’on fait rougir à un feu gradué, jusqu’à ce que les lames de cuivre soient fondues. On laisse ensuite refroidir le tout et l’on trouve le cuivre changé en laiton et augmenté d’un quart de son poids si l’on a employé un quart de calamine sur trois quarts de cuivre, et ce laiton fait par cémentation a tout autant de ductilité à froid que le cuivre même : mais, comme le dit très bien M. Macquer[1], il n’a pas la même malléabilité à chaud qu’à froid, parce que le zinc se fondant plus vite que le cuivre, l’alliage alors n’est plus qu’une espèce d’amalgame qui est trop mou pour souffrir la percussion du marteau. Au reste, il paraît, par le procédé et par le produit de cette

  1. Dictionnaire de chimie, à l’article Cuivre jaune.