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dans toute leur étendue ; ce ne sont que d’énormes fragments de schiste, de roche, de grès ou d’autres matières pierreuses superposées irrégulièrement, qui semblent s’être éboulées dans les vides de la terre[1].

Les schistes, qui couvrent et enveloppent les veines, sont souvent mêlés de terre limoneuse et presque toujours imprégnés de bitume et de matières pyriteuses ; ils contiennent aussi des parties ferrugineuses et deviennent rouges par l’action du feu ; plusieurs de ces schistes sont combustibles. On a des exemples de bonnes veines de charbon qui se sont trouvées au-dessous d’une mine de fer, et dans lesquelles le schiste qui sert de toit au charbon est plus ferrugineux que les autres schistes ; il y en a qui sont presque entièrement pyriteux, et les charbons qu’ils recouvrent ont un enduit doré et varié d’autres couleurs luisantes : ces charbons pyriteux conservent même ces couleurs après avoir subi l’action du feu ; mais ils les perdent bientôt s’ils demeurent exposés aux injures de l’air, car il n’y a pas de soufre en nature dans les charbons de terre, mais seulement de la pyrite plus ou moins décomposée, et, comme le fer est bien plus abondant que le cuivre dans le sein de la terre, la quantité des pyrites ferrugineuses ou martiales étant beaucoup plus grande que celle des pyrites cuivreuses, presque toutes les veines de charbon sont mêlées de pyrites martiales, et ce n’est qu’en très peu d’endroits où il s’en trouve de mélangées avec les pyrites cuivreuses.

Lors donc qu’il se trouve du soufre en nature dans quelques mines de charbon comme dans celle de Whitehaven en Angleterre, où le schiste qui fait l’enveloppe de la veine de charbon est entièrement incrusté de soufre[2], cet effet ne provient que du feu accidentel qui s’est allumé dans ces mines par l’effervescence des pyrites et l’inflammation de leurs vapeurs ; les mines de charbon dans lesquelles il ne s’est fait aucun incendie ne contiennent point de soufre naturel, quoique presque toutes soient mêlées d’une plus ou moins grande quantité de parties pyriteuses.

Ces charbons pyriteux sont donc imprégnés de l’acide vitriolique et des terres minérales et végétales qui servent de base à l’acide pour la composition de la pyrite ; ces charbons se décomposent à l’air, et très souvent il se produit à leur surface des filets d’alun par leur efflorescence : par exemple, les eaux qui sortent des mines de Montcenis en Bourgogne sont très alumineuses, et il n’est pas même rare de trouver des terres alumineuses près des charbons de terre. On tire aussi quelquefois de l’alun de la substance même du charbon ; on en a des exemples dans la mine de Laval en France[3] ; dans celle de Nordhausen en Allemagne[4], et dans celle du pays de Liège où M. Morand[5] a trouvé une grande quantité d’alun formé en cristaux sur les pierres schisteuses du toit des veines de charbon : « le territoire de ce pays, dit-il, ouvert pour les mines de houille, l’est également pour des terres d’alun dont les mines sont appelées alunières. »

L’alun n’est pas le seul sel qui se trouve dans les charbons de terre : il y a certaines mines de charbon, comme celles de Nicolaï en Silésie, qui contiennent du sel marin, et dont on tire des pierres quelquefois recouvertes d’une grande quantité de sel gemme. En général, tout ce qui entre dans la composition des pyrites et de la terre végétale doit se trouver dans les charbons de terre, car la décomposition de ces substances végétales et pyriteuses y répand tous les sels formés de l’union des acides avec les terres végétales et ferrugineuses.

  1. Du charbon de terre, etc., par M. Morand, p. 59 et suiv.
  2. Transactions philosophiques, année 1733.
  3. Essai sur les Mines, par M. Hellot, de l’Académie des sciences
  4. Bruckmann, Epistol. itinera., cap. xx, no 13.
  5. Du charbon de terre, etc., par M. Morand, p. 23.