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Pour rendre ceci plus sensible, supposons un terrain en forme d’entonnoir, c’est-à-dire une plaine environnée de collines dont les pentes soient à peu près égales : si cet entonnoir vient à se remplir par des alluvions successives, il est certain que l’eau déposera ses sédiments, tant sur les pentes que sur le fond, et dans ce cas les couches déposées se trouveront également épaisses en descendant d’un côté et en remontant de l’autre ; mais ce dépôt formera sur le plan du fond une couche plus épaisse que sur les pentes, et cette couche du fond augmentera encore d’épaisseur par les matières qui pourront descendre de la pente. Aussi les veines de charbon sont-elles, comme nous venons de le dire, toujours plus épaisses sur leur plateur que dans le cours de leur inclinaison ; les lits qui les séparent sont aussi plus épais par la même raison. Maintenant, si, dans ce même terrain en entonnoir, il se fait un second dépôt de la même matière de charbon, il est évident que, comme l’entonnoir est rétréci et les pentes adoucies par le premier dépôt, cette seconde veine, plus extérieure que la première, sera un peu moins inclinée, et n’aura qu’une moindre étendue dans son plateur : en sorte que, s’il s’est formé de cette manière plusieurs veines les unes au-dessus des autres, et chacune séparée par de grandes épaisseurs de matières étrangères, ces veines et ces matières auront d’autant plus d’inclinaison qu’elles seront plus intérieures, c’est-à-dire plus voisines du terrain sur lequel s’est fait le premier dépôt ; mais, comme cette différence d’inclinaison n’est pas fort sensible dans les veines qui ne sont pas à de grandes distances les unes des autres en profondeur, les minéralogistes se sont accordés à dire que toutes les veines de charbon sont parfaitement parallèles ; cependant il est sûr que cela n’est exactement vrai que quand les veines ne sont séparées que par des lits de médiocre ou petite épaisseur ; car celles qui sont séparées par de grandes épaisseurs ne peuvent pas avoir la même inclinaison, à moins qu’on ne suppose un entonnoir d’un diamètre immense, c’est-à-dire une contrée entière comme le pays de Liège, dont tout le sol est composé de veines de charbon jusqu’à une très grande profondeur.

M. Genneté a donné l’énumération[1] de toutes les couches ou veines de charbon de

  1. « Pour donner, dit-il, l’idée la plus complète de la marche variée des veines qui garnissent un même terrain, j’ai choisi la montagne de Saint-Gilles près de Liège, qui est presque dans le milieu de la trace où ces veines filent du levant au couchant, et où le penchant de la montagne fait découvrir le plus grand nombre de veines avec les plus grandes profondeurs auxquelles on puisse les atteindre… Le diamètre du plateau (de cette montagne) est d’environ mille pieds : c’est aussi la longueur de la première veine… qui s’étend de tous côtés, tant en longueur qu’en largeur, ainsi que toutes les autres qui suivent.
    Épaisseur des veines Distance entre les veines
    Pouces.Pieds. Pouces. Pieds.
    Distance du gazon à la première veine. » » 21
    Épaisseur de cette première veine. 1 3 »
    Cette première veine n’a partout qu’un seul lit ou épaisseur uniforme ; elle a un doigt d’épaisseur de houage (terre noire, meuble, qui se trouve dessous ou entre les bancs de houille), en dessous, ce qui la rend très facile à l’exploitation.
    Distance de la première à la seconde veine. » » 42
    Épaisseur de la seconde veine. 1 7 »
    Elle est séparée en deux lits, par un doigt d’épaisseur de houage.
    Distance de la deuxième à la troisième veine. » » 84
    Épaisseur de la troisième veine. 4 3 »
    Cette troisième veine est quelquefois séparée en deux par un