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transporté dans cet état par les eaux sur toute la surface du globe, s’est plus ou moins mêlé avec la terre végétale : il s’y est uni et atténué au point d’entrer avec la sève dans la composition de la substance des végétaux, et, par une suite nécessaire, dans celle des animaux ; les uns et les autres rendent ensuite ce fer à la terre par la destruction de leur corps. Lorsque cette destruction s’opère par la pourriture, les particules de fer provenant des êtres organisés n’en sont pas plus magnétiques, et ne forment toujours qu’une espèce de rouille plus fine et plus ténue que la rouille grossière dont elles ont tiré leur origine ; mais, si la destruction des corps se fait par le moyen du feu, alors toutes les molécules ferrugineuses qu’ils contenaient reprennent, par l’action de cet élément, la propriété d’être attirables à l’aimant, que l’impression des éléments humides leur avait ôtée ; et, comme il y a eu dans plusieurs lieux de la terre de grands incendies de forêts, et presque partout des feux particuliers et des feux encore plus grands dans les terrains volcanisés, on ne doit pas être surpris de trouver, à la surface et dans l’intérieur des premières couches de la terre, des particules de fer attirables à l’aimant, d’autant que les détriments de tout le fer fabriqué par la main de l’homme, toutes les poussières de fer produites par le frottement et par l’usure, conservent cette propriété tant qu’elles ne sont pas réduites en rouille. C’est par cette raison que, dans une mine dont les particules en rouille ou les grains ne sont point attirables à l’aimant, il se trouve souvent des paillettes ou sablons magnétiques qui, pour la plupart, sont noirs et quelquefois brillants comme du mica : ces sablons, quoique ferrugineux, ne sont ni susceptibles de rouille, ni dissolubles par les acides, ni fusibles au feu ; ce sont des particules d’un fer qui a été brûlé autant qu’il peut l’être et qui a perdu, par une trop longue ou trop violente action du feu, toutes ses qualités, à l’exception de la propriété d’être attiré par l’aimant, qu’il a conservée ou plutôt acquise par l’impression de cet élément.

Il se trouve donc dans le sein de la terre beaucoup de fer en rouille et une certaine quantité de fer en paillettes attirables à l’aimant. On doit rechercher le premier pour le fondre, et rejeter le second, qui est presque infusible. Il y a dans quelques endroits d’assez grands amas de ces sablons ferrugineux que des artistes peu expérimentés ont pris pour de bonnes mines de fer, et qu’ils ont fait porter à leur fourneau sans se douter que cette matière ne pouvait s’y fondre. Ce sont ces mêmes sablons ferrugineux qui se trouvent toujours mêlés avec le platine et qui font même partie de la substance de ce minéral.

Voilà donc déjà deux états sous lesquels se présente le fer disséminé sur la terre : celui d’une rouille qui n’est point attirable à l’aimant et qui se fond aisément à nos fourneaux, et celui de ces paillettes ou sablons magnétiques qu’on ne peut réduire que très difficilement en fonte ; mais, indépendamment de ces deux états, les mines de fer de seconde formation se trouvent encore sous plusieurs autres formes, dont la plus remarquable, quoique la plus commune, est en grains plus ou moins gros ; ces grains ne sont point attirables à l’aimant, à moins qu’ils ne renferment quelques atomes de ces sablons dont nous venons de parler, ce qui arrive assez souvent lorsque les grains sont gros ; les ætites ou géodes ferrugineuses doivent être mises au nombre de ces mines de fer en grains, et leur substance est quelquefois mêlée de ces paillettes attirables à l’aimant ; la nature emploie les mêmes procédés pour la formation de ces géodes ou gros grains que pour celle des plus petits ; ces derniers sont ordinairement les plus purs, mais tous, gros et petits, ont au centre une cavité vide ou remplie d’une matière qui n’est que peu ou point métallique ; et plus les grains sont gros, plus est grande proportionnellement la quantité de cette matière impure qui se trouve dans le centre. Tous sont composés de plusieurs couches superposées et presque concentriques ; et ces couches sont d’autant plus riches en métal qu’elles sont plus éloignées du centre. Lorsqu’on veut mettre au fourneau de grosses géodes, il faut en séparer cette matière impure qui est au centre, en les faisant