Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/207

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

formés, c’est-à-dire après la consolidation et la réduction en débris du quartz et des autres premiers verres : ces roches sont composées de molécules ferrugineuses intimement unies avec la matière vitreuse ; elles ont d’abord été fondues ensemble ; elles se sont ensuite consolidées par le refroidissement, sous la forme d’une pierre dure et pesante ; elles ont conservé cette forme primitive dans tous les lieux où elles n’ont pas été exposées à l’action des éléments humides ; mais les parties extérieures de ces roches ferrugineuses s’étant trouvées, dès le temps de la première chute des eaux, exposées aux impressions des éléments humides, elles se sont converties en rouille et en ocre. Cette rouille, détachée de leurs masses, aura bientôt été transportée, comme les sables vitreux, par le mouvement des eaux et déposée sur le fond de cette première mer, lequel, dans la suite, est devenu la surface de tous nos continents.

Par cette décomposition des premières roches ferrugineuses, la matière du fer s’est trouvée répandue sur toutes les parties de la surface du globe, et par conséquent cette matière est entrée avec les autres éléments de la terre dans la composition des végétaux et des animaux, dont les détriments, s’étant ensuite accumulés, ont formé la terre végétale dans laquelle la mine de fer en grain s’est produite par la réunion de ces mêmes particules ferrugineuses disséminées et contenues dans cette terre, qui, comme nous l’avons dit[1], est la vraie matrice de la plupart des minéraux figurés, et en particulier de mines de fer en grains.

La grande quantité de rouille détachée de la surface des roches primitives de fer, et transportée par les eaux, aura dû former aussi des dépôts particuliers en plusieurs endroits ; chacune de nos mines d’ocre est un de ces anciens dépôts, car l’ocre ne diffère de la rouille de fer que par le plus ou moins de terre qui s’y trouve mêlée. Et lorsque la décomposition de ces roches primordiales s’est opérée plus lentement, et qu’au lieu de se convertir en rouille grossière, la matière ferrugineuse a été atténuée et comme dissoute par une action plus lente des éléments humides, les parties les plus fines de cette matière ayant été saisies et entraînées par l’eau ont formé par stillation des concrétions ou stalactites ferrugineuses, dont la plupart sont plus riches en métal que les mines en grains et en rouille.

On peut réduire toutes les mines de fer de seconde formation à ces trois états de mines en grains, de mines en ocre ou en rouille, et de mines en concrétion ; elles ont également été produites par l’action et l’intermède de l’eau ; toutes tirent leur origine de la décomposition des roches primitives de fer, de la même manière que les grès, les argiles et les schistes proviennent de la décomposition des premières matières vitreuses.

J’ai démontré, dans l’article de la terre végétale[2], comment se sont formés les grains de la mine de fer ; nous les voyons, pour ainsi dire, se produire sous nos yeux par la réunion des particules ferrugineuses disséminées dans cette terre végétale, et ces grains de mine contiennent quelquefois une plus grande quantité de fer que les roches de fer les plus riches ; mais, comme ces grains sont presque toujours très petits, et qu’il n’est jamais possible de les trier un à un ni de les séparer en entier des terres avec lesquelles ils sont mêlés, surtout lorsqu’il s’agit de travailler en grand, ces mines en grains ne rendent ordinairement par quintal que de trente-cinq à quarante-cinq livres de fonte et souvent moins, tandis que plusieurs mines en roche donnent depuis cinquante jusqu’à soixante et au delà ; mais je me suis assuré, par quelques essais en petit, qu’on aurait au moins un aussi grand produit en ne faisant fondre que le grain net de ces mines de seconde formation ; elles peuvent être plus ou moins riches en métal, selon que chaque grain aura reçu dans sa composition une plus ou moins forte quantité de substance métallique, sans mélange de

  1. Voyez l’article de la Terre végétale, t. II, p. 616.
  2. Ibid., p. id. et suiv.