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DU FER


On trouve rarement les métaux sous leur forme métallique dans le sein de la terre ; ils y sont ordinairement sous une forme minéralisée, c’est-à-dire altérée par le mélange intime de plusieurs matières étrangères, et la quantité des métaux purs est très petite en comparaison de celle des métaux minéralisés ; car, à l’exception de l’or, qui se trouve presque toujours dans l’état de métal, tous les autres métaux se présentent le plus souvent dans l’état de minéralisation. Le feu primitif, en liquéfiant et vitrifiant toute la masse des matières terrestres du globe, a sublimé en même temps les substances métalliques, et leur a laissé d’abord leur forme propre et particulière ; quelques-unes de ces substances métalliques ont conservé cette forme native, mais la plupart l’ont perdue par leur union avec des matières étrangères et par l’action des éléments humides. Nous verrons que la production des métaux purs et celle des métaux mélangés de matière vitreuse par le feu primitif sont contemporaines, et qu’au contraire les métaux minéralisés par les acides et travaillés par l’eau sont d’une formation postérieure.

Tous les métaux sont susceptibles d’être sublimés par l’action du feu ; l’or, qui est le plus fixe de tous, ne laisse pas de se sublimer par la chaleur[1], et il en est de même de tous les autres métaux et minéraux métalliques : ainsi, lorsque le feu primitif eut réduit en verre les matières fixes de la masse terrestre, les substances métalliques se sublimèrent et furent par conséquent exclues de la vitrification générale ; la violence du feu les tenait élevées au-dessus de la surface du globe ; elles ne tombèrent que quand cette chaleur extrême, commençant à diminuer, leur permit de rester dans un état de fusion sans être sublimées de nouveau. Les métaux qui, comme le fer et le cuivre, exigent le plus de feu pour se fondre, durent se placer les premiers sur la roche du globe encore tout ardente : l’argent et l’or, dont la fusion ne suppose qu’un moindre degré de feu, s’établirent ensuite et coulèrent dans les fentes perpendiculaires de cette roche déjà consolidée ; ils remplirent les interstices que le quartz décrépité leur offrait de toutes parts, et c’est par cette raison qu’on trouve l’or et l’argent vierge en petits filets dans la roche quartzeuse. Le plomb et l’étain, auxquels il ne faut qu’une bien moindre chaleur pour se liquéfier, coulèrent longtemps après ou se convertirent en chaux, et se placèrent de même dans les fentes perpendiculaires ; enfin tous ces métaux, souvent mêlés et réunis ensemble, y formèrent les filons primitifs des mines primordiales, qui toutes sont mélangées de plusieurs minéraux métalliques. Et le mercure, qu’une médiocre chaleur volatilise, ne put s’établir que peu de temps avant la chute des eaux et des autres matières également volatiles.

Quoique ces dépôts des différents métaux se soient formés successivement et à mesure que la violence du feu diminuait, comme ils se sont faits dans les mêmes lieux, et que les fentes perpendiculaires ont été le réceptacle commun de toutes les matières métalliques fondues ou sublimées par la chaleur intérieure du globe, toutes les mines sont mêlées de

  1. Voyez les preuves, volume II de cette édition, p. 479, note a.