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dionale[1] et dans quelques contrées des Indes orientales[2]. La meilleure relation est celle qui a été publiée par l’un de nos plus laborieux et savants naturalistes, M. Valmont de Bomare[3], par laquelle il paraît que ce sel se trouve dans des terres grasses et dans des pierres tendres, arrosées ou peut-être formées du dépôt des eaux qui découlent des montagnes à mines métalliques, ce qui semble indiquer que ce sel est en dissolution dans ces eaux, et que la terre grasse ou la pierre tendre ont été pénétrées de cette eau saline et minérale. On appelle tinkal ou borax brut la matière qu’on extrait de ces terres et pierres par la lessive et l’évaporation, et c’est sous cette forme et sous ce nom qu’on l’apporte en Europe, où l’on achève de le purifier.

Dans leur état de pureté, les cristaux du borax ressemblent à ceux de l’alun ; ils contiennent cependant moins d’eau et en exigent une plus grande quantité pour se dissoudre, et même ils ne se dissolvent bien que dans l’eau chaude. Au feu, ce sel se gonfle moins

  1. Le borax, dont les orfèvres se servent pour purifier l’or et l’argent, se trouve dans la montagne de la province de Purbet, sous le Razia Biberom, vers la grande Tartarie… Le borax vient de la rivière de Jankenckav, laquelle, en sortant de la montagne, entre dans la rivière de Maseroov, laquelle traverse toute la province, et produit cette drogue, qui croit au fond de l’eau comme le corail : les Guzarates l’appellent jankenckhav, et le gardent dans des bourses de peau de mouton, qu’ils remplissent d’huile pour le mieux conserver. Voyages de Mandeslo, suite d’Oléarius ; Paris, 1656, t. II, p. 250.
  2. Il n’y a point d’autres précautions à prendre, dans l’achat du borax qui se fait dans la province de Guzarate, que de voir s’il est bien blanc et bien transparent, de même que le salpêtre. Suite des Voyages de Tavernier ; Rouen, 1713, t. V, p. 184.
  3. On nous a écrit en 1754 d’Ispahan, dit M. de Bomare, que le borax brun, tel qu’on l’envoie en Europe, se retirait d’une terre sablonneuse ou d’une pierre tendre, grisâtre, grasse, que l’on trouve seulement en Perse et dans l’empire du grand Mogol, à Golconde et à Visapour, proche des torrents et au bas des montagnes, d’où il découle une eau mousseuse, laiteuse, un peu âcre et lixivielle. Ces pierres sont de différentes grosseurs ; on les expose à l’air, afin qu’elles subissent une sorte d’efflorescence, jusqu’à ce qu’elles paraissent rouges à leur superficie, quelquefois verdâtres, obscures et brunâtres ; c’est là ce qu’on appelle matrice de borax, borax gras, brut, et pierre de borax. Tantôt ce sel se retire d’une eau épaisse, que l’on trouve dans des fosses très profondes près d’une mine de cuivre de Perse : cette liqueur a l’œil verdâtre, et la saveur d’un sel fade ; on a soin de ramasser non seulement cette liqueur, mais encore la matière comme gélatineuse, qui la contient : on fait une espèce de lessive, tant de l’eau que de la terre graisseuse et des pierres dont nous venons de faire mention, jusqu’à ce qu’elles soient tout à fait insipides ; on mélange ensuite toutes les dissolutions chargées de borax ; on les fait évaporer à consistance requise ; puis on procède à la cristallisation, en versant la liqueur à demi refroidie dans des fosses enduites de glaise ou d’argile blanchâtre et recouvertes d’un chapeau enduit de la même matière ; on laisse ainsi la liqueur se cristalliser, et, au bout de trois mois environ, on trouve une couche de cristaux diffus, opaques, terreux, verdâtres et visqueux, d’un goût nauséabond, qui flottent dans une partie de la liqueur qui n’a point totalement cristallisé ; on les expose quelque temps à l’air, afin qu’ils sèchent un peu : c’est ce qu’on appelle borax gras de la première purification.

    On dissout de nouveau ce sel dans une quantité suffisante d’eau ; puis l’on donne quelques jours à la dissolution, pour que les particules les plus hétérogènes s’en séparent et se précipitent ; ensuite on la décante : on l’évapore et on la met à cristalliser dans une autre fosse que la première, mais également enduite d’argile grasse : après l’espace de deux mois, on trouve des cristaux plus purs, plus réguliers que les précédents ; ils sont demi-blancs, verdâtres, grisâtres, un peu transparents, cependant toujours couverts d’une substance grasse, dont on les dépouille facilement en Hollande. C’est en cet état qu’on apporte en Europe ces cristaux de la seconde purification, auxquels l’on donne improprement le nom de borax brut, ou borax de la première fonte. Minéralogie de M. de Bomare, t. Ier, p. 344 et 345.