Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/137

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On peut ajouter à ces trois vitriols métalliques, qui tous trois se trouvent dans l’intérieur de la terre, une substance grasse à laquelle on a donné le nom de beurre fossile, et qui suinte des schistes alumineux ; c’est une vraie stalactite vitriolique ferrugineuse, qui contient plus d’acide qu’aucun des autres vitriols métalliques, et par cette raison M. le baron de Dietrich a cru pouvoir avancer que ce beurre fossile n’est que de l’acide vitriolique concret[1] ; mais, si l’on fait attention que cet acide ne prend une forme concrète qu’après une très forte concentration et par la continuité d’un feu violent, et qu’au contraire ce beurre vitriolique se forme, comme les autres stalactites, par l’intermède de l’eau, il me semble qu’on ne doit pas hésiter à le rapporter aux vitriols que la nature produit par la voie humide.

    fait subir un premier grillage par lequel on retire du soufre, et, pour obtenir le vitriol blanc, on fait les mêmes opérations que pour le vitriol vert. Ce vitriol blanc se fabrique toujours en été ; il faut que la lessive soit chargée de quinze ou dix-sept onces de vitriol avant de la mettre dans des cuves où elle doit déposer son limon jaune ; car, s’il en restait dans la lessive lorsqu’on la verse dans la chaudière pour la faire bouillir, le vitriol, au lieu d’être blanc, se cristalliserait rougeâtre… L’ébullition de la lessive du vitriol blanc doit être continuée plus longtemps que celle du vitriol vert… Lorsque la lessive est suffisamment évaporée, on la transvase dans la cuve à rafraîchir, et de là dans des cuviers de cristallisation où l’on arrange des lattes et des roseaux ; elle y reste quinze jours, après quoi on retire le vitriol blanc pour le mettre dans la caisse à égoutter, puis on le calcine et on l’enferme dans des barils. Traité de la fonte des mines de Schlutter, t. II, p. 639. — Wallerius, suivant la remarque de M. Valmont de Bomare (Minéralogie, t. Ier, p. 307), observe que le vitriol de zinc, indépendamment de ce demi-métal, paraît contenir aussi du fer, du cuivre, et même du plomb : cela peut être, en le considérant dans un état d’impureté et de mélange, mais il n’en est pas moins vrai que le zinc est sa base.

  1. M. le baron de Dietrich dit (note 34) que ce minéral est décrit par M. Pallas, sous le nom de kamenoja maslo ; en allemand, stein butters, c’est-à-dire beurre fossile. « Ce n’est, dit M. de Dietrich, autre chose qu’un acide vitriolique chargé de quelques parties ferrugineuses et de beaucoup de matières terreuses et grasses… On en tire d’un schiste alumineux fort dur et brun à Willischtan, sur la rive droite de l’Aï ; il suinte des fentes des rochers et des grottes formées dans ces schistes, sous la forme d’une matière grasse d’un blanc jaunâtre, qui se durcit un peu en la faisant sécher. Lorsqu’on examine avec attention les endroits les plus propres de ces grottes, on le découvre sous la forme d’aiguilles fines ; c’est, selon toute apparence, de l’acide vitriolique concret natif, comme celui qui a été découvert par le docteur Balthazar, en Toscane ; dès que le temps est humide, cette matière suinte avec bien plus d’abondance hors des rochers.

    » Il y a un schiste argileux vitriolique sur la rivière de Tomsk, près de la ville de ce nom, dont on extrait du vitriol impur jaune, qu’on vend mal à propos à Tomsk pour du beurre fossile. C’est à Krasnojark qu’on trouve le véritable beurre fossile en grande abondance et à bon marché ; on l’y apporte des bords du fleuve Jeniseï et de ceux du fleuve Mana, où on le trouve dans les crevasses et cavités d’un schiste alumineux noir, à la surface duquel il est attaché sous la forme d’une croûte épaisse et raboteuse : il y en a aussi en aiguilles ; il y est en général très blanc, léger, et lorsqu’on le brûle à la flamme qui le liquéfie facilement, et qu’on le fait bouillir, il s’en élève des vapeurs vitrioliques rouges, et le résidu est une terre légère très blanche et savonneuse. On trouve la même matière dans un schiste alumineux brun, sur le rivage de Chilok, près du village de Parkina ; le peuple se sert de cette matière en guise de remède pour arrêter les diarrhées et dysenteries, les pertes des femmes en couches, les fleurs blanches et autres écoulements impurs : on le donne pour vomitif aux enfants, afin de les débarrasser des glaires qu’ils ont sur la poitrine ; enfin on s’en sert encore en cas de nécessité, au lieu de vitriol, pour teindre le cuir en noir ; et l’on prétend que les forgerons en font usage pour faire de l’acier : ce dernier fait aurait mérité d’être constaté. » Voyage de M. Pallas, t. II, p. 88, 626, 697 ; et t. III, p. 258.