Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/119

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en assez grande quantité : il faut purifier tous ces soufres qui sont mélangés de parties hétérogènes, en les faisant fondre et sublimer pour les séparer de tout ce qu’ils ont d’impur. Presque tout le soufre qui est dans le commerce vient des volcans, des solfatares, et antres cavernes et grottes qui se trouvent ou se sont trouvées au-dessus des feux souterrains, et ce n’est guère que dans ces lieux que le soufre se présente en abondance et tout formé ; mais ses principes existent en bien d’autres endroits, et l’on peut même dire qu’ils sont universellement répandus dans la nature, et produits partout où l’acide vitriolique, rencontrant les débris des substances organisées, s’est saisi et surchargé de leur feu fixe, et n’attend qu’une dernière action de cet élément pour se dégager des masses terreuses ou métalliques dans lesquelles il se trouve comme enseveli et emprisonné : c’est ainsi que les principes du soufre existent dans les pyrites, et que le soufre se forme par leur combustion ; et partout où il y a des pyrites, on peut former du soufre ; mais ce n’est que dans les contrées où les matières combustibles, bois ou charbons de terre, sont abondantes, qu’on trouve quelque bénéfice à tirer le soufre des pyrites[1]. On ne fait ce travail en grand que dans quelques endroits de l’Allemagne et de la Suède, où les mines de cuivre se présentent sous la forme de pyrites ; on est forcé de les faire griller plusieurs fois pour en faire exhaler le soufre que l’on recueille comme le premier produit de ces mines. Le point essentiel de cette partie de l’exploitation des mines de cuivre, dont on peut voir ci-dessous les procédés en détail[2], est d’empêcher l’inflammation du soufre en même

  1. Pour connaître si les pyrites dont on veut tirer le soufre en contiennent assez pour payer les frais, il faut en mettre deux quintaux dans un scorificatoire pour les griller ; après quoi, on pèsera ces deux quintaux, et on verra combien il y aura eu de déchet, et cette perte est comptée pour la quantité de soufre qu’elle contenait.

    On connaîtra cette quantité plus précisément en distillant les pyrites dans une cornue : il faut alors les briser en petits morceaux ; on ramasse tout le soufre qui passe à la distillation dans l’eau qu’on tient dans le récipient ; on le fait sécher ensuite, et on le joint à celui qui demeure attaché au col de la cornue pour connaître le poids du total. Traité de la fonte des mines de Schlutter, t. Ier, p. 255.

  2. Il y a des ateliers construits exprès à Schwartzenberg en Saxe, et en Bohême dans un endroit nommé Alten-Sattel : on y retire le soufre des pyrites sulfureuses ; les fourneaux construits pour cela reçoivent des tuyaux de terre dans lesquels on met ces pyrites ; et, après que ces tuyaux ont été bien lutés pour que le soufre ne puisse en sortir, on adapte les récipients de fer, dans lesquels on a mis un peu d’eau au bec de ces tuyaux qui sortent des fourneaux, et on lute ensemble ; ensuite on échauffe les fourneaux avec du bois, pour faire distiller le soufre des pyrites dans l’eau des récipients… On casse les pyrites de la grosseur d’une petite noix ; on en fait entrer trois quintaux dans onze tuyaux, de manière qu’il n’y en ait pas plus dans l’un que dans l’autre ; on bouche ensuite le tuyau du côté le plus ouvert avec des couvercles de terre… Après avoir bien luté, de l’autre côté du fourneau, ces mêmes tuyaux avec les récipients… on fait du feu dans le fourneau, mais peu à peu, afin que les tuyaux ne prennent de chaleur que ce qu’il en faut pour faire distiller le soufre… Et au bout d’environ huit heures de feu, on trouve que le soufre a passé dans les récipients… L’on fait alors sortir les pyrites usées pour en remettre de nouvelles à la même quantité de trois quintaux ; l’on répète les mêmes manœuvres que dans la première distillation, et on recommence une troisième opération.

    On retire ensuite du vitriol des pyrites usées ou brûlées. Ces onze tuyaux dans lesquels on a mis, en trois fois, neuf quintaux de pyrites, rendent, en douze heures, depuis cent jusqu’à cent cinquante livres de soufre cru ; et, comme on passe chaque semaine environ cent vingt-six quintaux de pyrites par le fourneau, on en retire depuis quatorze jusqu’à dix-sept quintaux de soufre cru. Traité de la fonte des mines de Schlutter, t. II, p. 235 et suiv.M. Jars, dans ses Voyages métallurgiques, t. III, p. 308, ajoute ce qui suit au procédé décrit par Schlutter.

    On met dans ce fourneau onze tuyaux de terre que l’on a auparavant enduits avec de l’ar-