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et il ajoute que c’est uniquement à la quantité du fer contenu dans les laves et basaltes qu’on doit attribuer leur fusibilité : cette dernière assertion me paraît trop exclusive ; ce n’est pas en effet au fer, du moins au fer seul, qu’on doit attribuer la fusibilité des laves, c’est au salin, contenu dans les cendres rejetées par le volcan, qu’elles ont dû leur première vitrification ; et c’est au mélange des matières vitreuses, calcaires et salines, autant et plus qu’aux parties ferrugineuses, qu’elles doivent la facilité de se fondre une seconde fois. Les laves se fondent comme nos verres factices et comme toute autre matière vitreuse mélangée de parties calcaires ou salines, et en général tout mélange et toute composition produit la fusibilité ; car l’on sait que plus les matières sont pures, plus elles sont réfractaires au feu ; le quartz, le jaspe, l’argile et la craie purs y résistent également, tandis que toutes les matières mixtes s’y fondent aisément ; et cette épreuve serait le meilleur moyen de distinguer les substances simples des matières composées, si la fusibilité ne dépendait pas encore plus de la force du feu que du mélange des matières ; car, selon moi, les substances les plus simples et les plus réfractaires ne résisteraient pas à cette action du feu si l’on pouvait l’augmenter à un degré convenable.

En comparant toutes les observations que je viens de rapporter, et donnant même aux différentes opinions des observateurs toute la valeur qu’elles peuvent avoir, il me paraît que le feu des volcans peut produire des matières assez semblables aux porphyres et granits, et dans lesquelles le feldspath, le mica et le schorl se reconnaissent sous leur forme propre ; et ce fait seul une fois constaté suffirait pour qu’on dût regarder comme plus que vraisemblable la formation du porphyre et du granit par le feu primitif, et à plus forte raison celle des matières premières dont ils sont composés.

Mais, dira-t-on, quelque sensibles que soient ces rapports, quelque plausibles que paraissent les conséquences que vous en tirez, n’avez-vous pas annoncé que la figuration de tous les minéraux n’est due qu’au travail des molécules organiques qui, ne pouvant en pénétrer le fond par la trop grande résistance de leur substance dure, ont seulement tracé sur la superficie les premiers linéaments de l’organisation, c’est-à-dire les traits de la figuration ? Or il n’y avait point de corps organisés dans ce premier temps où le feu primitif a réduit le globe en verre ; et même est-il croyable que dans ces feux de nos fourneaux ardents où nous voyons se former des cristaux, il y ait des molécules organiques qui concourent à la forme régulière qu’ils prennent ? Ne suffit-il pas d’admettre la puissance de l’attraction et l’exercice de sa force par les lois de l’affinité pour concevoir que toutes les parties homogènes se réunissant, elles doivent prendre en conséquence des figures régulières, et se présenter sous différentes formes relatives à leur différente nature, telles que nous les voyons dans ces cristallisations ?

Ma réponse à cette importante question est que, pour produire une forme régulière dans un solide, la puissance de l’attraction seule ne suffit pas, et que l’affinité n’étant que la même puissance d’attraction, ses lois ne peuvent varier que par la diversité de figure des

    fusibilité n’est due qu’à ce même fer ; il dit que le basalte est de toutes les matières volcaniques celle qui est la plus intimement liée et combinée avec les éléments ferrugineux ; que le fer y est très voisin de l’état métallique, et que c’est à cette cause qu’on peut attribuer la facilité qu’a le basalte de se fondre ; que les laves se trouvent plus ou moins altérées, en raison des différentes impressions et modifications qu’a éprouvées le principe ferrugineux… Que la pouzzolane, le tuffeau, les laves tendres, rouges, jaunâtres ou de différentes couleurs, les laves poreuses, les laves compactes, sont toutes les mêmes quant à leur essence, et ne diffèrent que par les modifications que le feu ou les vapeurs y ont occasionnées… Qu’enfin la pouzzolane rouge ou d’un brun rougeâtre, étant une des productions volcaniques non seulement la plus riche en fer, mais celle où ce minéral se trouve atténué et le plus à découvert, doit former un ciment de la plus grande dureté. » Idem, p. 207.