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SOMME DU BIEN-ÊTRE DES ANIMAUX ACCRUE

en nous des sources nombreuses d’espérance et de consolation, et c’est au sein des douleurs que l’humanité trouve à développer les sentimens de charité les plus élevés et les sympathies les plus tendres. Mais rien de semblable à ces facultés n’existe dans les animaux inférieurs. Là, point de tendresse, point d’égards pour ceux qui sont faibles ou cassés par les années : aucun soin n’y vient alléger les douleurs de la maladie ; et la vie, prolongée jusqu’aux époques reculées du déclin et de la vieillesse, ne serait pour chaque être qu’une série de longues misères. Avec un pareil système, la nature offrirait le spectacle quotidien d’une somme de souffrances énorme, si on venait à la comparer avec la somme de jouissantes qui a été accordée aux animaux. Dans ce système, au contraire, où les êtres sont soudainement détruits et promptement remplacés, tout ce qui est faible ou cassé est bientôt délivré de ses maux, et le monde n’est habité que par des myriades d’êtres doués de toutes leurs facultés et jouissant de tous les bienfaits de l’existence ; et si, pour un grand nombre, la part de vie qui leur est accordée n’a que bien peu d’étendue, du moins peut-elle être considérée comme un bienfait non interrompu, et la douleur momentanée d’une mort soudaine et inattendue n’est plus qu’un mal bien léger, si on le compare aux jouissances dont elle vient arrêter le cours.

Ainsi donc, des deux grandes divisions dans lesquelles se sont toujours partagés les habitans du globe, herbivores et carnivores, ces derniers, dont l’existence semble au premier abord avoir pour but d’accroître la somme des maux pour tous les êtres animés qui les entourent, nous apparaissent sous un point de vue tout opposé, dès que nous venons à les considérer dans l’ensemble de leurs rapports.

À tout homme qui dans l’économie de la nature ne s’élève pas jusqu’aux résultats généraux, le globe peut paraître le théâtre d’une guerre incessante et d’un carnage sans règle.