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fut convenu que j’entrerais en fonctions Je lendemain, et nous nous séparâmes.

M. Pelet était un homme d’environ quarante ans ; d’une taille moyenne, assez maigre, ayant le visage pâle, les joues creuses, les yeux enfoncés, des traits réguliers, une figure agréable, fine et spirituelle, qui attestait son origine, car il était né de parents français ; mais dont le caractère gaulois, toujours un peu dur, était modifié par des yeux bleus d’une grande douceur et par une certaine expression de mélancolie. C’était en somme un être intéressant et qui vous prévenait tout d’abord en sa faveur ; je m’étonnai seulement de ne lui trouver aucun des traits caractéristiques de sa profession, et je craignis qu’il n’eût pas la fermeté nécessaire pour diriger convenablement sa maison : bref, M. Pelet, du moins à l’extérieur, présentait un contraste frappant avec M. Crimsworth.

Je fus donc très-surpris, en arrivant dans les classes où il me conduisit le lendemain, d’y trouver un nombre considérable d’élèves, très-jeunes pour la plupart, et dont la tenue collective annonçait une discipline sévère et une pension florissante et parfaitement conduite ; un profond silence régnait sur tous les bancs ; si, par hasard, un chuchotement ou un murmure venait à se faire entendre, il suffisait que l’œil pensif du maître se tournât de ce côté pour que tout rentrât immédiatement dans l’ordre ; et je ne pouvais assez m’étonner de la puissance de ce moyen de répression aussi doux qu’efficace.

« Consentiriez-vous à donner votre première leçon tout de suite, afin de connaître la force de vos élèves ? » me demanda M. Pelet quand nous eûmes fini de parcourir toutes les classes.

Cette question me prenait au dépourvu ; j’avais compté au moins sur un jour ou deux de préparation ;