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s’en allât. Est-ce pour vous punir, William, que Crimsworth vous a imposé un jeûne aussi rigoureux ?

— Non, monsieur… »

Par bonheur, au moment où j’allais répondre quelque chose d’un peu vif, mon souper arriva, et je tombai immédiatement sur le pain et sur la viande que la bonne avait placés devant moi. Lorsque j’eus fait disparaître tout ce que j’avais mis sur mon assiette, je m’humanisai au point d’inviter M. Hunsden à s’approcher de la table et à faire comme moi, s’il en éprouvait le moindre désir.

« Je n’ai certainement pas envie de manger, » dit-il ; mais rappelant la servante, il lui demanda un verre d’eau, et un seau de charbon : « M. Crimsworth, ajouta-t-il, aura bon feu tant que je serai auprès de lui. »

Quand la bonne eut exécuté ses ordres, il roula son fauteuil devant la table, et s’y accoudant en face de moi :

« Eh bien, me dit-il, vous voilà donc sans place… ? »

Je venais, quelques instants auparavant, de considérer mon départ de l’usine comme une véritable délivrance ; mais, dans la disposition d’esprit où je me trouvais alors, je me plus à envisager la chose comme un tort sérieux qui m’avait été fait.

« Oui, monsieur, et grâce à vous, répondis-je ; c’est à je ne sais quelle intervention de votre part que je dois d’avoir été remercié ; du moins c’est là le motif que m’a donné M. Crimsworth.

— Ah ! il vous a parlé de cela ? et que pense-t-il de son ami Hunsden ? rien de flatteur probablement ?

— Il vous qualifie de misérable et vous accuse de trahison !

— Eh ! qu’en peut-il savoir ? il me connaît à peine. Je suis de ces gens réservés qui ne se dévoilent pas tout d’abord ; plus tard, quand il m’aura vu plus souvent, il découvrira que j’ai d’excellentes qualités ; les