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taire et montueuse, dont la verdure n’est pas flétrie par la fumée des usines, dont les eaux transparentes sont restées pures, dont les collines couvertes de fougère ont conservé leur aspect sauvage, leurs mousses, leurs bruyères primitives, les vallées leur parfum, et la brise sa fraîcheur. Notre maison est pittoresque, assez grande, sans être néanmoins spacieuse ; les fenêtres irrégulières y sont encadrées de fleurs qui couvrent la façade, et le porche, à demi voilé par un lacis déplantés grimpantes, est, à l’heure où j’écris, un berceau de roses et de lierre. Le jardin s’incline par une pente insensible ; l’herbe des pelouses est courte comme un tapis de mousse et tout émaillée de fleurs ; par le sentier ombreux et gazonné où conduit la petite porte du jardin, on arrive, après de longs détours, à une prairie où paraissent, au printemps, les premières marguerites ; de là son nom de Daisy-Lane, qui sert aussi à désigner la maison.

Cette prairie forme un vallon, boisé sur l’autre rive, où les chênes et les hêtres couvrent d’ombre les alen- tours d’un vieux manoir datant du règne d’Élisabeth, et appartenant à un personnage bien connu du lecteur ; oui, cet édifice aux murailles grises, aux nombreux pignons, aux cheminées plus nombreuses encore, est la résidence de Yorke Hunsden, toujours célibataire, n’ayant pas, je suppose, trouvé son idéal, bien que je connaisse une vingtaine de jeunes filles, à quarante milles à la ronde, qui ne demanderaient pas mieux que de l’aider dans ses recherches. C’est à la mort de son père que ce domaine lui échut en partage, il y a bientôt cinq ans ; il se retira des affaires à cette époque, après y avoir gagné une somme suffisante pour dégager le manoir paternel des charges dont il était grevé. Comme je l’ai dit plus haut, Hunsden réside à Hunsden-Wood, mais tout au plus