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gleterre. L’adresse était d’une écriture que je ne connaissais pas, fine, élégante, mais sans caractère bien tranché, pas précisément l’écriture d’une femme, encore moins celle d’un homme ; le cachet portait un écusson : ce n’étaient pas les armes des Seacombe ; l’épître ne venait donc pas de ces parents oubliés, qui à coup sûr ne pensaient point à moi. De qui pouvait-elle être ? Je déchirai l’enveloppe, et je lus les ligues suivantes :

« Je suis persuadé que vous vous trouvez à merveille dans ces Flandres fécondes où vous vous engraissez du limon de cette terre onctueuse, assis, comme un Israélite au long nez, à la peau brune, aux cheveux noirs et touffus, auprès du pot-au-feu de la riche Égypte ; ou bien comme un ignoble fils de Lévi, à côté des chaudrons d’airain du sanctuaire, où, plongeant de temps en temps votre fourchette consacrée, vous retirez de cette mer de bouillon les offrandes les plus charnues, les hosties les plus grasses. Et vous n’avez écrit à personne depuis votre départ d’Angleterre, chien d’ingrat que vous êtes ! Par la souveraine efficacité de ma recommandation, je vous fais obtenir une place où vous vivez comme un chanoine, et pas un mot de remercîment, pas une expression de reconnaissance, vil coq en pâte ! Mais, moi, je viens vous voir, et votre cerveau stérile et aristocratique est loin de soupçonner la force du coup de pied moral que je vous destine immédiatement après mon arrivée.

« Je connais toutes vos affaires ; Brown m’a tout raconté dans sa dernière missive. Vous êtes, me dit-il, sur le point de faire un mariage avantageux avec une petite maîtresse de pension, une appelée Zénobie ou quelque chose d’approchant. Ne pourrai-je pas la voir, et me la montrerez-vous ? Je vous préviens toutefois que, si elle me plaît, ou si je trouve qu’elle en vaille la peine au point de vue pécuniaire, je fonds sur votre proie et