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chauffer de l’eau : je prends du thé tous les dimanches ; vous serez bien obligé de supporter un peu de feu. »

Le bois fut bientôt allumé ; et vraiment le contraste que formait avec l’orage du dehors cet intérieur paisible, doucement éclairé par le feu, produisait une sensation délicieuse ; un bruit étouffé, semblable au ronflement d’un rouet, m’annonça qu’une autre créature jouissait comme moi du changement opéré dans le foyer ; un chat noir, tiré de son sommeil par le pétillement de la flamme, se leva lentement du tabouret coussiné où il avait dormi, et vint frotter son gros dos à la robe de Frances. La jeune fille était agenouillée devant le feu ; elle caressa Minette, en disant que c’était la favorite de sa pauvre tante Julienne.

Une petite bouilloire de forme ancienne, comme je me rappelais en avoir vu autrefois dans les vieilles fermes anglaises, ronflait maintenant au-dessus de la grille ; Frances avait lavé ses mains et quitté son tablier. Elle prit dans une armoire un plateau, sur lequel elle arrangea un service à thé en porcelaine, dont la forme remontait à une époque reculée ; une petite cuiller d’argent, très-vieille aussi, fut déposée dans chaque soucoupe ; les pinces, également anciennes, ne manquèrent pas au sucrier ; l’armoire fut ouverte de nouveau, et un petit pot au lait en argent, grand comme une coquille d’œuf, en sortit pour venir à côté de la théière ; pendant qu’elle faisait tous ces préparatifs, Frances leva les yeux, et, voyant la curiosité qui se peignait sur mon visage, elle se prit à sourire.

« Est-ce comme en Angleterre, monsieur ? me demanda-t-elle.

— Oui, ou plutôt comme c’était en Angleterre il y a cent ans.

— Cela n’a rien d’étonnant : tous les objets que vous voyez ont été laissés par ma bisaïeule à ma grand’mère,