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de votre maison ! Vous aviez besoin de sa place, et vous la lui avez rendue intolérable.

— Pas du tout, monsieur ; votre pénétration est cette fois en défaut ; j’étais simplement inquiète de la santé de cette jeune fille. Mlle Henri m’a toujours inspiré un véritable intérêt ; j’étais affligée de la voir sortir par tous les temps ; je pensais qu’il serait plus avantageux pour elle d’obtenir une position sédentaire ; d’ailleurs elle est assez instruite aujourd’hui pour enseigner autre chose que la couture ; je lui ai dit tout cela en lui montrant le côté raisonnable de la question ; elle a compris la justesse de mes vues et s’y est librement conformée.

— Parfait, en vérité ! Seriez-vous maintenant assez bonne pour me donner son adresse ?

— Son adresse ? mais…, reprit Mlle Reuter, dont la figure s’était assombrie et glacée tout à coup ; son adresse ! Mon Dieu ! je serais enchantée de vous obliger ; mais il m’est impossible de vous apprendre où elle demeure, elle n’a jamais voulu me le dire, elle m’a toujours fait une réponse évasive toutes les fois que je le lui ai demandé ; je suppose, il est possible que je me trompe, je suppose qu’elle a craint, bien à tort, de me faire connaître le logement qu’elle habite. Elle est pauvre, d’une famille obscure ; dès lors il est probable qu’elle demeure dans la basse ville.

— Je ne veux cependant pas, répondis-je, perdre de vue ma meilleure élève, fût-elle d’une famille de mendiants et logée dans un grenier ; il est d’ailleurs très-inutile de me faire un épouvantail de sa naissance : je sais qu’elle est la fille d’un ministre protestant des environs de Genève ; quant à sa fortune, je m’inquiéterai peu de la pauvreté de sa bourse tant qu’elle aura dans le cœur cette richesse dont il déborde.

— Ce sont là, monsieur, de très-nobles idées, ré-