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monotone et restreinte, je priai ma tante de venir demeurer en Belgique, et nous partîmes pour Bruxelles. Je ne suis ici ni plus riche ni mieux posée ; mon existence est toujours enfermée dans des limites aussi étroites ; mais la scène a changé : elle changera de nouveau si je vais en Angleterre. Je connaissais les bourgeois de Genève, je connais maintenant ceux de Bruxelles ; je connaîtrai quelque chose des habitants de Londres, si je vais quelque jour dans cette ville. Je ne sais pas si vous trouvez quelque sens à mes paroles ; il est possible que je n’aie pas su exprimer ma pensée.

— Bien, bien ; passons à autre chose. Vous avez l’intention de vous destiner à l’enseignement et vous ne semblez pas devoir réussir dans cette carrière, à en juger par la façon dont vous dirigez vos élèves. »

Elle baissa la tête en rougissant ; une expression pénible se peignit sur son visage ; mais se remettant bientôt :

« Je suis, il est vrai, dit-elle, un triste professeur ; néanmoins la pratique me rendra plus habile. D’ailleurs je rencontre ici de nombreuses difficultés ; je n’enseigne que la couture et de menus ouvrages à l’aiguille ; c’est un art inférieur, où la supériorité n’a rien à voir, et qui ne donne aucun prestige ; et puis je suis isolée, je n’ai pas d’amis dans cette maison, et ma qualité d’hérétique m’enlève toute influence.

— Vous n’en aurez pas davantage à Londres, où vous serez étrangère et tout aussi dépourvue d’amis et de connaissances.

— Au moins j’y apprendrai quelque chose. Il y a partout des difficultés à vaincre pour les personnes qui se trouvent dans la même position que moi ; et l’orgueil britannique me fera toujours moins souffrir que a grossièreté flamande ; en outre j’ai besoin… »