Page:Brontë - Le Professeur.djvu/160

Cette page n’a pas encore été corrigée

malités d’usage d’élève à professeur, mais encore je m’étais aperçu qu’elle avait d’autant plus d’abandon que je mettais plus de réserve dans mes manières, plus de sévérité dans mon langage ; contradiction bizarre, que je ne pouvais comprendre, mais qui n’en existait pas moins.

« Un crayon, » lui dis-je en étendant la main sans la regarder ; et soulignant les fautes qu’elle avait faites dans son thème : « Êtes-vous née en Belgique ? lui demandai-je.

— Non, monsieur.

— En France ?

— Non, monsieur.

— Où donc alors ?

— À Genève.

— Frances et Evans ne sont pas des noms suisses.

— Non, ils sont anglais.

— Est-ce la coutume des Génevois de baptiser leurs enfants sous des noms étrangers ?

— Non monsieur, mais…

— Parlez anglais, miss.

— Mais…

— Parlez anglais, vous dis-je.

— Ma mère était Anglaise.

— Et votre père ?

— Il était Suisse.

— Quelle était sa profession ?

— Pasteur d’une église de village.

— Fille d’une Anglaise, comment ne parlez-vous pas anglais avec plus de facilité ?

— Ma mère est morte il y a dix ans.

— Et c’est en oubliant la langue qu’elle parlait que vous rendez hommage à sa mémoire ! Ayez la bonté de ne jamais dire un mot de français quand vous causerez avec moi.