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rudesse, un manque absolu d’égards pour ses professeurs, d’indulgence pour ses compagnes, un égoïsme ardent à satisfaire ses désirs, et un complet oubli des besoins et de l’intérêt des autres. La plupart savaient mentir avec audace toutes les fois que le mensonge offrait quelque avantage. Elles possédaient toutes à merveille l’art des paroles flatteuses quand elles avaient quelque chose à obtenir, et celui de vous tourner le dos à l’instant où l’amabilité cessait d’être profitable. Il était rare qu’elles fussent en querelle ouverte les unes avec les autres ; mais la délation et la médisance étaient universelles ; le règlement défendait les amitiés intimes, et ces demoiselles ne paraissaient avoir pour leurs compagnes que le degré d’affection nécessaire aux relations banales qui préservent des ennuis de la solitude. On les supposait élevées dans l’ignorance la plus complète du vice ; on employait pour les y maintenir des précautions innombrables. Comment se fait-il que, parmi ces ignorantes, on aurait à peine trouvé une jeune fille de quatorze ans qui pût regarder un homme en face avec simplicité ; et qu’elles répondissent invariablement au regard le plus naturel d’un œil masculin, par un air d’impudente coquetterie ou une œillade à la fois niaise et lascive ? Je ne sais rien des arcanes de l’Église catholique, et je suis loin d’être intolérant en matière religieuse ; mais je soupçonne que cette impudicité précoce, si frappante et si générale dans les contrées papistes, prend sa source dans la discipline, sinon dans les préceptes de l’Église romaine. Je rapporte ce que j’ai vu : ces jeunes filles appartenaient aux classes les plus respectables de la société ; on les élevait avec un soin scrupuleux, et cependant la masse avait l’esprit complètement dépravé.

Choisissons dans le nombre une ou deux individualités qui nous servent de spécimen.