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deaux à reflets si doux ; Hortense avec ses lèvres vermeilles, ses joues roses, son regard piquant et mutin, ses cheveux tordus et nattés, qui s’enroulent en nœuds épais, comme si elle n’avait su que faire de leur opulente abondance. Et Caroline de Blémont ! ah ! quelle beauté parfaite ! quelle figure de houri entourée d’un voile de cheveux noirs ! quelle bouche fascinatrice ! quels yeux splendides ! Votre Byron l’eût adorée ; et vous, froid insulaire, vous jouez l’austérité en présence d’une pareille Aphrodite ? »

J’aurais pu rire de l’enthousiasme du chef d’institution, si je l’avais cru réel ; mais il y avait dans ses paroles, ou plutôt dans la manière dont il les débitait, quelque chose qui trahissait un ravissement de mauvais aloi ; je sentais qu’il jouait la passion afin de gagner ma confiance et de m’entraîner à lui ouvrir mon cœur. Je souris à peine ; il continua : « Avoue-le, William, ne trouves-tu pas que Zoraïde n’est plus qu’une grosse maman, aux charmes épais et vulgaires, en face de la merveilleuse beauté de ses élèves ? »

Cette question me déconcerta ; mon principal s’efforçait évidemment pour des motifs à lui connus, et dont je ne soupçonnais pas la profondeur, de faire naître en moi des pensées et des désirs que réprouvent la droiture et les mœurs. L’iniquité même de cette insinuation en devenait l’antidote, et quand il eut ajouté : « Une belle fortune attend ces trois adorables jeunes filles ; avec un peu d’adresse, un garçon intelligent et distingué comme vous, pourrait se rendre maître de la main et de la bourse de celle des trois dont il aurait voulu se faire aimer. » Je lui répondis par un regard et une exclamation qui le troublèrent ; il se mit à rire d’un air contraint, m’affirma qu’il avait voulu plaisanter et me demanda si j’avais pu croire qu’il parlât sérieusement ; au même instant la cloche qui an-