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DU SERPENT.

dans sa moustache correctement ajustée ; on peut le remarquer même, dans les inflexions de sa voix, qui s’élève et tombe avec une régularité plutôt monotone qu’harmonieuse, et qui n’est jamais altérée par une de ces causes vulgaires telles que l’inquiétude ou l’émotion.

À dix heures de cette matinée, il est encore à déjeuner ; il n’a rien mangé, mais il est en train de boire sa seconde tasse de café, et il est aisé de voir qu’il réfléchit profondément.

« Oui, murmure-t-il. Il me faut trouver un moyen de la convaincre. Elle doit être entièrement convaincue avant d’être amenée à agir. Mes premiers coups ont si bien porté, que je ne dois pas faillir dans mon coup de maître. Mais comment la convaincre ? Des paroles seules ne la satisferont pas longtemps. Il faut une démonstration oculaire. »

Il finit sa tasse de café et se met à jouer avec la cuillère qui produit par son choc contre la tasse de Chine une série de petits sons sourds ; bientôt il frappe un coup plus fort qui fait résonner une note de triomphe. Il était occupé à chercher un problème, il vient d’en trouver la solution. Il prend son chapeau et sort précipitamment de la maison ; mais aussitôt qu’il est sur le boulevard il ralentit son pas et reprend son ancienne démarche nonchalante, en s’acheminant vers l’Opéra ; c’est vers la porte du théâtre qu’il dirige ses pas. Un homme