Page:Braddon - La Trace du serpent, 1864, tome I.djvu/246

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
238
LA TRACE

L’étranger conservant cette charmante insouciance qui lui donne le cachet de sa classe à elle, dit en réponse à sa requête.

« Je puis vous guider dans votre vengeance, madame, si votre noble sang espagnol ne recule pas devant l’épreuve. Revêtez demain soir le costume de votre servante, avec un voile épais, bien entendu ; prenez une voiture de place et à dix heures trouvez-vous à la barrière de l’Étoile ; je vous rejoindrai là. Vous aurez votre vengeance, madame, et je vous montrerai à l’exercer avantageusement (chose qui constitue un luxe dispendieux). Dans quelques jours vous pourrez peut-être dire : il n’y a plus de Robert le Diable ; la terrible illusion n’était qu’un rêve, je me suis éveillée et je suis libre. »

Elle passe sa main tremblante sur son front, et le regarde comme si elle essayait de saisir, mais en vain, le sens de ces paroles.

« À dix heures à la barrière de l’Étoile ? j’y serai.

— C’est bien ! et maintenant, madame, adieu. Je crains de vous avoir fatiguée par la longueur de cet entretien. Attendez, vous devez connaître le nom de celui à qui vous accordez l’honneur de vous servir. »

Il tire son portefeuille, dépose une carte sur la petite table à côté d’elle, s’incline respectueusement, et la laisse. Il la laisse foudroyée dans la poussière. Il se retourne pour la regarder avec un sourire, en