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LA TRACE

tôt ce square derrière lui, traversa deux ou trois rues sombres, étroites, de construction ancienne, et arriva dans un labyrinthe de ruines, véritables chenils et nids à pigeon humides, connu sous le nom de Allée de Peter l’aveugle. Qu’avait été ce Peter l’aveugle, et comment était-il parvenu à posséder cette allée ? ou bien, cet endroit n’ayant pas de débouché et ne laissant pénétrer que très-peu la lumière, avait-il été appelé dans l’origine l’Allée aveugle de Peter ? nul être vivant ne le savait. Mais si Peter l’aveugle était un mythe, l’allée était une réalité et une sale, dégoûtante et fétide réalité, à l’égard de laquelle le conseil de salubrité semblait frappé de la propre infirmité du Peter susdit, qui lui laissait ignorer les horreurs du lieu. Ainsi Peter l’aveugle était l’Alsace de Slopperton, un refuge pour le crime et pour la misère, car celle-ci ne peut pas choisir sa société et doit se contenter souvent, pour avoir un abri, de vivre pêle-mêle avec le crime, ce qui fait, sans aucun doute que, s’appuyant sur l’excellent proverbe sur les oiseaux de même plume, les gens sages et bienveillants pensent que crime et misère signifient la même chose. L’allée de Peter l’aveugle s’était élevée à la réputation une ou deux fois à l’occasion d’une jeune fille qui avait empoisonné son père dans une croûte de pouding, et du suicide d’un petit garçon de quatorze ans qui s’était pendu derrière une porte de l’aveugle Peter. Dans la