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AURORA FLOYD

assez à Johnson. La seconde enveloppe ne contenait absolument qu’une liste de paris sur papier pelure d’oignon ; la troisième contenait un sale morceau de papier avec quelques mots tracés au crayon ; mais à la vue de l’enveloppe de la première lettre des trois qui restaient, Conyers tressaillit comme s’il venait de recevoir une balle dans la poitrine. Mme Powell portait alternativement les yeux sur le visage de l’entraîneur et sur l’enveloppe de la lettre ; sa surprise n’était guère moins forte que celle de Conyers. L’adresse était écrite de la main d’Aurora.

C’était une écriture toute particulière ; une de ces écritures sur le compte de laquelle il n’y avait pas de méprise possible ; ce n’était pas une italienne élégante, délicate, penchée et féminine, mais grosse et hardie, avec d’énormes jambages, qu’il eût été facile de reconnaître à une distance plus grande que celle qui séparait Mme Powell de l’entraîneur ; Il n’y avait pas moyen de douter. Mme Mellish avait écrit au valet de son mari, et son écriture était évidemment connue de cet homme, qui pourtant était surpris de recevoir une lettre d’elle.

Il déchira l’enveloppe, lut et relut avec avidité les lignes qu’elle contenait ; son front se plissa et s’assombrit pendant cette lecture.

Mme Powell se souvint tout à coup qu’elle avait laissé une partie de son ouvrage sur un chiffonnier placé derrière la chaise du jeune homme, et elle se leva pour l’aller chercher. Il était si troublé par la lettre qu’il tenait à là main, qu’il ne remarqua pas cette figure pâle qui, pendant une seconde ou deux, se pencha sur son épaule, pendant que ces yeux gris avides jetaient un regard rapide sur les lignes contenues sur cette page.

La lettre était écrite sur le premier recto d’une feuille de papier à lettres ; quelques mots seulement étaient reportés sur la seconde feuille. C’était cette seconde page qu’avait vue Mme Powell. Voici quels étaient les mots écrits en haut de la feuille :

« Surtout ne témoigne aucune surprise.
« A. »