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AURORA FLOYD

sous l’aile de son vigoureux adorateur ; mais il ne s’ensuit pas que l’histoire de sa vie soit terminée. Elle a évité le naufrage pendant un temps, elle a abordé saine et sauve de séduisants rivages ; mais souvent l’orage est encore bien loin à l’horizon, quand on entend gronder la voix menaçante du tonnerre.


CHAPITRE XV

La lettre de Pastern.

Mellish s’était réservé une chambre au rez-de-chaussée de sa maison. C’était une pièce fort gaie, où l’air arrivait en abondance, et dont les fenêtres à la française ouvraient sur la pelouse ; ces fenêtres étaient abritées du soleil par une vérandah d’où pendaient des jasmins et des roses. C’était, il faut en convenir, une pièce fort agréable pendant l’été. Le plancher était recouvert d’une natte de l’Inde, et presque toutes les chaises étaient faites en bois léger et tressé comme l’osier. Au-dessus de la cheminée était suspendu un portrait du père de John, et, en face de cette œuvre d’art, on voyait l’image du cheval favori du défunt. Le cadre était surmonté d’une paire d’éperons polis et brillants, dont les molettes avaient fréquemment pressé les flancs du fidèle coursier. Mellish avait rassemblé dans cette pièce ses fouets, ses cannes, ses cravaches, ses gants pour la boxe, ses éperons, ses fusils, ses pistolets, de la poudre, des balles, des engins de pêche, etc. ; et bien des matinées étaient employées par le maître de Mellish Park à polir, réparer, inspecter, en un mot à mettre en ordre tous ces objets. Il avait des paires de bottes en assez grand nombre pour en fournir la moitié du comté de Leicester, et ses fouets n’étaient pas moins nombreux. Entouré de ces trésors, qui formaient comme un temple consacré aux divi-