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Ils ne sont point empêchés dans leur marche, par la quantité de leur bagage ; leurs chameaux portant leurs tentes & leurs nattes de jonc. Ce sont-là leurs meubles, leurs lits, leurs palais & leurs temples.

Ces peuples, mon cher Monceca, estiment plus leur vie champêtre, que les courtisans n’idolâtrent le faste & l’embarras de la cour. [1]

Chez eux l’âge d’or vit encore : leur bétail leur fournit les mets les plus délicats ; & ce même bétail pourvoit à leurs autres besoins. La laine de leurs moutons suffit pour les vétir. Ils en font une étoffe, qui les garantit des injures de l’air. Ils regardent comme insensés des hommes qui construisent des palais immenses, & qui croient encore y être logés à l’étroit. Les soins, les chagrins, disent-ils, n’habitent-ils pas dans ces somptueux édifices ? Si l’homme n’y est pas plus content & plus satisfait

  1. Beatus ille, qui, procul negotiis,
    Ut prisca gens mortalium,
    Paterna rura bobus exercet suis,
    Solutus omne faenore ;
    Neque excitatur classico miles truci,
    Neque horret iratum mare ;
    Forumque vitat, & superba civium
    Potentiorum limina.
    Horat. Epod. liber, Ode II.