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pernicieux n’a que trop de partisans, on croiroit que c’est une de ces chimères que les théologiens inventent quelquefois, pour avoir le plaisir de les combattre. Mais il est vrai qu’on n’attribue aux quiétistes, que les sentimens dont ils sont très-persuadés. Un nommé Michel Molinos fut celui qui leur donna le plus de crédit. Il fit deux ouvrages, l’un intitulé la Guide spirituelle, & l’autre la Communion particulière.

Au milieu de Rome, souvent même dans des lieux destinés aux exercices de la religion, lui & ses partisans rendirent ce systême fatal à plus d’un mari Romain : & Molinos, l’esprit au ciel attaché, fit plus d’un cocu sur la terre. Enfin les jaloux Italiens revinrent de la léthargie où les avoient plongés les exhortations, les discours publics, & la vie apparente de ce docteur hypocrite. Il fut anathématisé, & on le condamna à une prison perpétuelle, dans laquelle il mourut. L’inquisition se contenta de lui imposer cette peine, pendant qu’elle eût fait brûler un homme, pour avoir douté du massacre des onze mille vierges, ou de la grande vertu des indulgences. Mais elle ne trouva pas que le crime de Molinos fût assez considérable, n’ayant guère fait plus de bâtards dans toutes ces pieuses extases, qu’en fit