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CHAPITRE II

LA CONCEPTION SYNTHÉTISTE
DES MATHÉMATIQUES

Dès le commencement de l’ère chrétienne, le grand courant intellectuel qui avait donné naissance à la Mathématique hellénique était parvenu au terme de son parcours. Sans doute cette Mathématique resta en honneur et continua à être cultivée pendant une longue suite de siècles, dans le monde antique d’abord, chez les Arabes et chez les Occidentaux ensuite. Mais son progrès s’était arrêté, et elle n’était plus guère que la matière inerte d’un enseignement d’école. Pour susciter un mouvement de pensée originale, il fallut un fait nouveau. Ce fait fut la création de l’algèbre moderne. Pour en bien comprendre la portée il convient d’examiner avec quelques défaits dans quelles conditions est née l’algèbre, à quels besoins et à quelles tendances elle répondait, dans quels milieux et dans quel esprit elle se développa tout d’abord.


I. — Origines, objet et méthode de l’algèbre[1].

Un savant de Bagdad, Mohammed Ben Musa-Al--

  1. Une partie de ce paragraphe a été publiée dans la Revue de Métaphysique en mars 1913 et au t. I de nos Principes de l’Analyse mathématique, Hermann, 1914.