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menter le nombre de leurs demandes, et qu’ils se sont contentés qu’on leur accordât qu’ils pussent joindre deux points donnés par une ligne droite et décrire un cercle, d’un centre donné, qui passât par un point donné : car ils n’ont point fait de scrupule de supposer, outre cela, pour traiter des sections coniques, qu’on pût couper tout cône donné par un plan donné. Et il n’est point besoin de rien supposer, pour tracer toutes les lignes courbes que je prétends ici introduire, sinon que deux ou plusieurs lignes puissent être mues l’une par l’autre, et que leurs intersections en marquent d’autres… »

Cependant Descartes lui-même n’a pas su tirer toutes les conséquences des remarques qu’il formulait. Il s’est arrêté en chemin : car, s’il introduit dans la Géométrie la conchoïde et la cissoïde, il continue par contre à en exclure la spirale et la quadratrice, et ne s’élève pas à la notion générale de courbe telle que la conçoit la science moderne.


Nous nous sommes étendus un peu longuement sur la théorie de la construction. C’est qu’en effet, ramenée à son origine historique, cette théorie se trouve être particulièrement instructive. Elle nous montre très nettement comment, dès son point de départ, — lorsqu’il opère le triage des éléments sur lesquels il fera porter ses spéculations, — le géomètre grec s’impose à lui-même une limitation qui ne peut être justifiée par aucune raison sérieuse sinon par le désir d’obtenir une science simple et bien ordonnée. Nous allons voir se préciser ce caractère arbitraire de la Mathématique grecque si, laissant désormais de côté les notions élémentaires (matière des raisonnements du savant), nous