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Il ne faut pourtant pas conclure de là que les questions énumérées plus haut soient naturellement liées aux problèmes philosophiques avec lesquels elles se rencontrent dans l’esprit de nombreux penseurs. Les conceptions sur la science que nous voudrions voir dégagées par l’historien ont sans doute le plus souvent suggéré des conceptions philosophiques, soit à leurs auteurs mêmes, soit à ceux qui les ont regardées du dehors. Mais, comme nous l’avons déjà observé plus haut, il n’y a point interdépendance, il n’y a même pas parallélisme des unes et des autres. L’histoire que nous avons en vue est exclusivement tournée vers la science et reste indifférente aux doctrines métaphysiques.

Pour justifier cette assertion, il n’est pas nécessaire de procéder à une longue étude. Nous avons en effet la bonne fortune de posséder, pour ce qui regarde la définition des problèmes historico-philosophiques, une base d’appréciation extrêmement sûre et complète dans le bel ouvrage qu’a publié récemment M. Léon Brunschvicg sur les étapes de la philosophie mathématique[1].

M. Brunschvicg s’est attaché à montrer comment l’histoire des théories mathématiques permet d’expliquer l’évolution des doctrines philosophiques auxquelles ces théories ont donné lieu. Il y a, pense-t-il, corrélation constante entre les deux ordres de spéculation, chaque progrès technique important se traduisant immédiatement par un

  1. L. Brunschvicg. Les étapes de la philosophie mathématique, 1912.
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