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qu’elles n’ont pas été explicitement formulées (et elles ne sauraient l’être puisqu’elles sont en nombre infini) sont contenues dans la notion d’ellipse. Notre tâche consiste alors à disséquer le tout qui nous est offert afin de faire apparaître les éléments qui rendent le mieux compte de l’allure et des caractères de la courbe. C’est ainsi que l’analyse ou décomposition de l’arc en ses éléments nous conduit à caractériser la courbe par sa tangente ou par sa courbure en un point quelconque. Dans le même esprit nous sillonnons l’aire de l’ellipse par des droites parallèles aux axes de symétrie, ou par des droites issues du centre et par des arcs de cercles, et de la longueur de ces sillons nous déduisons la grandeur de l’aire courbe et de ses parties. Tantôt nous considérons l’ellipse comme l’intersection d’un cône et d’un plan, tantôt comme la projection orthogonale d’un cercle, tantôt comme le lieu des points jouissant de telle ou telle propriété. Infiniment nombreux sont les biais par où l’on peut aborder l’étude de l’ellipse. « Mais nous sommes, comme le dit Platon[1], dans une situation critique, où c’est une nécessité pour nous de tourner les objets de tous côtés pour en sonder la vérité ».


Les caractères que nous sommes ainsi conduits à attribuer aux faits mathématiques nous expliquent les difficultés contre lesquelles se débat le savant qui cherche à les connaître. Il lui faut conquérir une matière rebelle et imposer à cette matière une forme qui ne lui convient pas. De là les tâtonnements, les hésitations, les artifices dont nous avons parlé plus haut, et qui ne sont que les péripéties de l’investissement ou de l’assaut, par lesquels on réduit des notions à première vue impre-

  1. Théétète.