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partant de la Logique, ne pourrons-nous pas établir entre celle-ci et les théories de l’Analyse un lien de dépendance et de subordination.

Sans entrer ici dans une discussion détaillée du rôle de la Logique, nous devons noter entre les points de vue adoptés par divers philosophes contemporains une différence fondamentale. Les uns voient dans la Logique une science déterminée ayant des postulats distincts et un rôle propre. Les autres ne croient pas que la Logique puisse être ainsi isolée, et ils l’identifient plus ou moins avec la forme de toutes les sciences. C’est manifestement la première de ces doctrines qu’adoptaient vers l’année 1900 les partisans convaincus des nouvelles théories logiques. Ainsi M. Itelson, au Congés de philosophie[1] de 1904, proclamait l’indépendance de la logique et la définissait Wissenschaft der Gegenstände überhaupt. Nous observons dans les Principes des mathématiques[2] de Bertrand Russell une tendance analogue. Pour Russell, sans doute, la Logique n’est pas une science spéciale, puisqu’elle comprend, par exemple, toutes les Mathématiques ; mais c’est une science fixe et définie ; c’est une science qui route sur des constantes logiques absolument déterminées et immuables[3], dont le nombre est limité et constant. En ce sens, la logique est une science particulière. — Mais, d’autre part, Couturat paraît prendre le mot Logique dans une acception beaucoup plus générale et vague lorsqu’il écrit[4] : « De ce

  1. Cf. le compte-rendu du IIe Congrès de philosophie, Revue de Métaphysique, novembre 1904, p. 1037 et suiv.
  2. The Principles of Mathematics, Cambridge, 1900.
  3. Which deals with logical constants absolutely definite (loc. cit., p. 6 et suiv.). M. Russell a modifié depuis lors sa théorie des constantes logiques, mais il en a conservé le principe.
  4. Voir Revue de Métaphysique, novembre 1904, p. 1046-55.