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théorème nouveau est démontré par combinaison des axiomes et des théorèmes déjà acquis. L’édifice mathématique construit à l’époque d’Euclide, — agrandi depuis lors, et flanqué de nouvelles annexes — se présente en somme à nous comme le résultat d’une vaste synthèse logique effectuée sur des propositions.

Qu’est-ce qui nous empêche dès lors d’appliquer à cette synthèse une méthode analogue à celle de l’algèbre ? Partant des propositions les plus simples, nous en étudierons a priori les combinaisons en faisant abstraction de leur contenu ; nous comparerons ces combinaisons, nous apprendrons à reconnaître dans quels cas elles sont équivalentes, dans quels cas elles sont compatibles[1] ou incompatibles, nous les transformerons les unes dans les autres.

La science des propositions ainsi étendue a permis de consolider et de perfectionner sur de nombreux points l’édifice euclidien. C’est grâce à elle que l’on a pu surmonter — ou à peu près — les difficultés relatives aux définitions ou axiomes, qui si longtemps embarrassèrent les géomètres.

Le but à atteindre est le suivant : construire l’édifice mathématique en partant de postulats aussi simples et, surtout, aussi peu nombreux que possibles. Or, lorsque nous établissons la suite des théorèmes, il se trouve qu’en fait nous nous appuyons à maintes reprises sur des vérités indémontrées qui sont de nature intuitive. Ces vérités sont-elles des conséquences logiques des postulats simples dont la liste est donnée au début de la science (en ce cas elles sont démontrables et il convient

  1. Ou, plus généralement, dans quel cas une proposition quelconque est ou non compatible avec un groupe donné de propositions simultanées, c’est-à-dire vraies en même temps.