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ques ». Quelque vaste, cependant, que soit cette famille, on constate bien vite qu’elle ne comprend pas la totalité des relations quantitatives entre grandeurs variables que les mathématiciens peuvent se proposer d’étudier. Déjà dans la science du xviie siècle, il existait tout un ensemble de calculs irréductibles, en partie au moins, aux opérations fondamentales de l’arithmétique : nous voulons parler des calculs où interviennent des lignes trigonométriques et des logarithmes[1]. Ces calculs doivent le plus souvent être effectués au moyen de tables, ce qui les distingue radicalement des calculs ordinaires de l’algèbre. La question suivante se pose dès lors : dans quelle mesure les expressions sin x, cos x, log x, etc. (appelées aujourd’hui transcendantes) peuvent-elles et doivent-elles être assimilées aux fonctions algébrique ?

Cette question, aussi ancienne en somme que le calcul trigonométrique, se précisa et s’imposa à la discussion dans les premières années du xviie siècle. Si. en effet, il pouvait être permis auparavant de regarder comme étranger l’un à l’autre, et de séparer par une cloison étanche, le domaine des calculs algébriques et celui de la trigonométrie, pareille attitude devenait insoutenable le jour où, par la théorie des dérivées, des liens directs se trouvèrent établis entre les deux domaines. On reconnut, par exemple que la fonction arc sin x doit être considérée comme la fonction primitive[2] de 1/1 − x² ; de même 1/x a pour fonction primitive log x. Il

  1. Le calcul trigonométrique était déjà en usage chez les astronomes alexandrins. Il fut développé par les Arabes. Viète consacra à ce calcul un important ouvrage. Les bases du calcul des logarithmes furent posées dans l’ouvrage de Néper, publié à Edinburgh en 1614 : Mirifici logarithmorum canonis recensio
  2. C’est-à-dire que 1/1 − x² est la dérivée de arc sin x.