Page:Boursault - Germanicus, 1694.djvu/38

Cette page n’a pas encore été corrigée

Si tantôt à vos yeux j'ai montré ma faiblesse, Jusqu'à faire l'aveu d'un amour qui vous blesse, Plus soumis à présent, j'y reviens à mon tour, Étaler mon respect, et non plus mon amour. Ce n'est pas que ma flamme obscurcit votre lustre, Si le Ciel m'eut fait naître en un rang plus illustre : Mais des droits de l'Amour aucun coeur n'est exempt ; Et ce que sent un Prince un autre homme le sent ; Soit qu'on naisse du Peuple, ou d'un sang qu'on renomme, Pour aimer comme j'aime il suffit qu'on soit homme. Ce n'est pas à son choix qu'on se laisse enflammer : Nous naissons pour mourir, et vivons pour aimer : Et de quoi qu'envers vous ma passion m'accuse, La beauté de mon crime en doit faire l'excuse. Cet amour de mon coeur est banni pour jamais.

Agrippine

Me le promettez-vous ?

Pison

Oui, je vous le promets. Je suis guéri, Madame ; et vous allez connaître, Qu'il serait mal-aisé de le pouvoir mieux être. J'ai repris sur moi-même un empire absolu. C'est assez qu'une fois mon amour ait déplu. Je ne vous dirai plus, puisque tout m'est contraire, Que mon sort est d'aimer, si le vôtre est de plaire : Je ne vous dirai plus, qu'asservi par vos yeux, Je regardais mes fers comme un bien précieux : Je ne vous dirai plus, que l'amour qui m'enchaîne, Me fait voir un supplice à l'hymen qui vous gêne : Je ne vous dirai plus qu'épris de vos appas...