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Agripine

Ah ! Pison, si mes yeux ont osé vous séduire, Puisque je l'ignorais deviez-vous m'en instruire ? Et ne saviez-vous pas qu'en trahissant leur sort, Avec le sang d'Auguste ils n'étaient pas d'accord ? En tout autre que vous il serait punissable, Cet amour qui m'outrage, et qui vous rend coupable : Vous pouviez m'estimer, et me rendre des soins...

Pison

Eh ! que n'ai-je pas fait pour aimer un peu moins ? À l'aspect imprévu d'un mérite sublime, On n'a pas le loisir d'arrêter à l'estime ; Comme un coeur qui s'enflamme ose plus qu'il ne croit, On se trouve à l'amour sans savoir qu'on y soit ; La raison et les sens ont beau faire divorce ; Quand les sens sont gagnez la raison est sans force : Et si c'est vous trahir que d'avoir tant d'ardeur, Le crime est de mon Astre, et non pas de mon coeur.

Agripine

Si mes faibles appas, qu'offensent votre flamme, Ont osé s'abaisser jusqu'à toucher votre âme, Je veux bien consentir qu'envers moi, sur ce point, Vous soyez peu coupable, ou ne le soyez point : Mais envers votre Prince, outragé par ce crime, Qui pour votre mérite a tant conçu d'estime, Qui chérit tendrement un ami supposé, Et qui croit si fidèle un rival déguisé ; Quand de tant de bienfaits sa bonté vous accable, Croyez-vous qu'envers lui vous soyez peu coupable ? Et ne songez-vous point que vous seriez perdu, Si quelqu'autre que moi vous avait entendu ?

Pison

Si ma témérité, qu'un seul mot peut confondre,