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râpée, la couleur rougeâtre et la forme démodée ressortirent plus encore par le contraste.

— « Mais rien n’est trop beau pour M. René maintenant, » fit madame Offarel avec son acrimonie ordinaire, et, tournant sa rancune du côté d’Angélique dont l’action lui avait déplu : « Tu seras bien heureuse si ton mari est toujours aussi bien mis que ton père… »

René s’était assis cependant à côté de Rosalie. Il n’avait pas relevé l’épigramme de la terrible bourgeoise, et il ne se mêla pas davantage au reste de la conversation, que la sage Émilie fit aussitôt dévier du côté de la cuisine. Sur ce sujet madame Offarel se passionnait presque autant que sur Cendrette, Raton, Petit-Vieux, et Beaupoil, ses quatre chats. Elle ne se contentait pas d’avoir des recettes à elle pour toutes sortes de plats, tels que le coulis d’écrevisses, son triomphe, et le canard sauce Offarel, comme elle l’avait dénommé elle-même, son orgueil. Elle possédait aussi des adresses particulières pour les diverses fournitures, traitant Paris comme le Robinson de Daniel de Foë traite son île. De temps à autre, elle faisait de véritables descentes dans certains quartiers, à des distances infinies de la rue de Bagneux, allant pour sa provision de café dans tel magasin, et pour les pâtes d’Italie dans tel autre. Elle savait qu’à un certain