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résultats ; ce qui pourtant a cessé, sur les plaintes qu’en a faites le soussigné, de ce qu’on le jugeait avant de l’entendre.

7o L’Archevêque ne fait pas maintenant preuve de sagesse en ne profitant pas des bonnes dispositions de notre gouvernement actuel, pour demander que les articles du Code Civil, qui contiennent des dispositions contraires au Droit Canon, soient réformés, comme, à la demande du Saint Père, l’a décrété en 1868, le IV Concile Provincial, par ces paroles : « Cum in Codice Civili Canadæ inferioris quidam articuli non satis congruere videantur doctrinæ et disciplina Ecclesiæ de matrimonio, statuimus petitionem præsentandam esse Gubernio ab Episcopis ejusdem provinciæ, ut corrigantur iidem articuli. »

8o L’Archevêque n’a pas non plus fait preuve de sagesse, quand il s’est agi de recueillir les suffrages de ses suffragants relativement au démembrement du diocèse des Trois-Rivières, sur lequel le Saint Siège demandait l’opinion de l’Épiscopat de la province. Car les Évêques, consultés là-dessus, se déclarèrent en majorité contre ce projet. Néanmoins l’archevêque qui était pour et qui aurait dû émettre ses raisons devant les Évêques, afin de faire discuter la chose plus mûrement, pour l’information du St. Siège, se réserva d’en écrire privément à la S. Congrégation en lui transmettant le rapport de l’assemblée, comme si les raisons particulières qu’il avait à donner sur ce sujet très-grave, ne pouvaient et ne devaient pas être la matière des délibérations de la dite assemblée. Il pouvait donner à penser que, lorsqu’il différait d’opinion d’avec ses suffragants, il avait un moyen certain de l’emporter sur eux, en s’adressant privément à Rome ; ce qui est de nature à lui détacher le cœur de ses suffragants qui, pour cette raison, peuvent en concevoir de l’ombrage.

9o Enfin, l’Archevêque ne fait pas preuve de sagesse, dans la question de l’intervention du Clergé dans les élections politiques portée à Rome, et qui fait le sujet de la lettre actuelle. En voici les raisons.

Il est à remarquer d’abord que l’Archevêque et ses suffragants, voulant, d’un commun accord, établir, pour l’instruction des fidèles, plus clairement les rapports entre l’Église et l’État, et faire disparaître, autant que possible, certaines difficultés soulevées à l’occasion des élections, adressèrent, le 22 Septembre 1875, une Lettre Pastorale collective, qui produisit les plus heureux résultats, et mérita les plus grands éloges des vrais amis de la religion, non-seulement dans ce pays, mais encore à l’étranger, et même à Rome.

Ce fut l’Archevêque lui-même qui rédigea cette magnifique Lettre ; et tous les suffragants la signèrent de grand cœur. Car ils virent que, par cette Lettre, les vrais principes étaient hautement, clairement et fortement professés ; et surtout que la funeste division qui avait jusqu’alors régné entre les Évêques allait cesser.

Or, voilà que pendant que tous, Évêques, Prêtres, laïques bien intentionnés, bénissaient la divine Providence de cet heureux résultat, l’Archevêque modifia tout-à-coup ses idées sur ce qui avait été réglé dans la dite Lettre. Certaines discussions soulevées vers ce temps-là et dans lesquelles ses meilleurs amis se trouvèrent compromis, paraissent avoir été la cause de ce changement opéré si subitement dans sa manière d’envisager le libéralisme dans les élections.

Quoiqu’il en soit, il comprit qu’après la susdite Lettre du 22 Septembre dernier, il lui était difficile de revenir seul sur ses pas. Voilà pourquoi il proposa à ses suffragants de modifier en