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À L’ACADÉMIE FRANÇAISE

Cette justice qu’il se rend pour la première partie de son travail est méritée. Il eût pu se la rendre aussi large pour les volumes où il a étudié la guerre civile de 1871, et pour ceux dans lesquels il a raconté les miracles accomplis par la charité privée à Paris. Qu’il s’agisse des incendies et des assassinats commis par les forcenés de la Commune, ou des plus touchants épisodes de la piété et du dévouement, il estime que ni pour les premiers l’indignation, ni pour les seconds l’enthousiasme ne valent cette enquête précise, minutieuse, qui commence par établir des faits et des dossiers. Certes personne plus que lui, identifié à ce degré avec Paris, n’a maudit l’insurrection criminellement soulevée devant l’ennemi victorieux, et détesté la frénésie de sauvage vandalisme soudain déchaînée à travers tant de précieux monuments, reliques de la bonne volonté des pères qui devraient être à jamais sacrées aux fils. Cette insurrection, il a eu pourtant le courage de l’étudier, comme il eut étudié la Ligue ou les Armagnacs. Ce vandalisme, il a voulu en connaître le détail, pièces en main. Il sait les noms, les actes, les motifs de chaque action dans cet effroyable drame. S’il écrit l’histoire d’une prison, il distingue le directeur demeuré humain à l’égard des otages et celui qui a déployé, dans cette tyrannie momentanée, des cruautés de bête féroce. Il distingue, parmi cette étrange cohue d’administrateurs improvisés qui avaient envahi les fonctions publiques, ceux qui ont, suivant un de ses mots, « exercé d’une façon irréprochable les pouvoirs qu’ils avaient eu le tort d’usurper », et ceux qui n’y ont vu