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la société des nations

telle Cour, juridiction supérieure aux juridictions nationales, armée du pouvoir souverain de réformer les décisions des tribunaux d’État en matière de prises, c’est là un fait aussi considérable pour l’Europe que pût l’être pour la Grèce l’établissement des Amphyctionies.

S’il y avait une notion qui semblât intangible à la diplomatie, c’était celle de la souveraineté absolue des États.

Or, cette souveraineté prenait, ici, à la lumière du droit, une physionomie nouvelle. Elle n’était plus absolue, mais seulement relative. Il n’y avait plus de principe qui fût au-dessus de la justice.

Toute une catégorie de litiges entre les nations allait être soumise aux décisions d’une juridiction placée au-dessus des souverainetés, juridiction internationale, permanente, obligatoire.

Cependant les sceptiques n’avaient point désarmé. Le principe d’une telle juridiction était admis, mais son existence était-elle possible ?

Comment, disait-on, jugera-t-elle, cette Cour des Prises ? Elle n’a pas de code entre les mains. Les États sont divisés sur les principes mêmes du droit maritime. Certaines puissances continentales et certaines puissances navales ont, en cette matière, des doctrines opposées, irréductibles. Comment pourrait-on, de tant d’éléments inconciliables, faire sortir une jurisprudence commune ?