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lisés sont à nos yeux des personnes morales, conscientes, ayant le devoir de réfléchir au bien-fondé de leurs prétentions réciproques et capables de considérer « la justice et le droit » comme un bien supérieur qu’il est de l’intérêt de tous de sauvegarder. Pour eux, c’est un devoir et c’est en même temps un grand bienfait de soumettre à l’arbitrage équitable de tiers désintéressés le sort de leur différend. Lorsque le droit a été dit entre eux, les passions redoutables s’apaisent. Et, comme hier encore, la France et l’Italie viennent de le constater si heureusement grâce à la sentence arbitrale du Carthage et du Manouba, chacune des parties ayant, sans atteinte à son honneur, pu reconnaître ce qu’avaient de fondées les prétentions de son adversaire, trouve, dans une période nouvelle de tranquillité et de dignité, les moyens de se développer librement et d’acquérir dans la paix un degré de puissance qu’une guerre, même heureuse, ne lui aurait peut-être pas donné.

Le sentiment de l’utilité de ces arbitrages a pénétré si bien l’opinion universelle que l’on n’avait pas vu, au moins dans les limites de notre Europe, de guerre se déclarer depuis plus de trente-cinq ans. Et de dangereux conflits entre l’Angleterre et la Russie, entre la France et l’Allemagne, avaient pu, dans ces dernières années, recevoir, grâce aux conventions de la Haye, leur solution arbitrale.