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dans cette impasse — la lanterne à la main, couverte d’un manteau vert d’où émergent seulement ses pieds et le bas du pantalon — hésite entre deux périls : celui d’être bousculée par le bœuf ou de s’étaler à son tour. Alors, adieu aussi, pour ce soir, la séance de sorcellerie à laquelle elle se rend peut-être, ou le papotage avec l’amie qu’elle va voir.

Déjà j’entends ses cris, ses appels au conducteur qui, lui, emboîte prudemment le pas de son bœuf, assuré que là où sa charge passera, il pourra bien passer lui-même sans crainte, et il va ainsi pendant des heures, rêvant à je ne sais quoi, insensible aux bousculades de cette énorme charge qu’il conduit, qui le conduit plutôt, vers sa demeure.

Je peux, avec des sauts et une gymnastique compliquée, me tirer de ce mauvais pas, et je n’attends pas davantage la conclusion, car si la femme tombe, ce sera une dispute d’au moins une heure, et à tue-tête, entre les deux parties, les trois même, car le bœuf, aussi bien qu’innocent de ce qui se passe à droite et à gauche de sa grosse tête, recevra sa part des injures, et étant donnés le ton et le choix de celles qui sont réservées aux humains, je me demande ce que peuvent être celles adressées aux bétes !…