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Après Tchong-sou, à la traversée de la rivière, j’assiste à une scène pénible. Des curieux, des gamins surtout, suivent les gestes d’une pauvre folle, une jeune fille qui, depuis plus d’une heure, escalade les pierres d’un ancien pont en ruine, et cherche sous chaque pierre quelque chose d’invisible. Puis je la vois se jeter dans l’eau glacée et y exécuter une danse extraordinaire à la grande joie des gamins qui l’excitent.

Nous repartons, navrés de ce triste spectacle. Seuls les villages apparaissent misérables au milieu de ces riantes vallées, larges et bien cultivées : on se demande pourquoi il n’y a pas plus de richesse, de confort chez ces paysans ? C’est que — probablement — les dîmes prélevées par les mandarins sont trop fortes et, malgré leurs grands champs de culture, ils sont tout de même réduits au strict nécessaire.

Kanentari, Ane-son-pa-pal sont des coins ravissants dans des vallées boisées, où coulent de clairs ruisseaux. Un rideau de saules cache les maisonnettes des villages. On entend partout les cris des paysans excitant leurs bœufs, et les chants des semeurs.

Au col de Tcha-ho-rion, après une montée très raide, nous découvrons en avant une grande vallée. La nature géologique des terrains a changé. Nous sommes dans le calcaire à présent ; les collines peu hautes, à pentes douces, s’écartent peu à peu de la route qui suit le milieu d’une grande plaine, admirablement cultivée.

À Sai-soul-mak, misérable village, nous faisons halte pour déjeuner. Les cultivateurs accourent pour ce spectacle extraordinaire, et on m’amène une jeune fille affligée d’une taie sur un œil, en me de-