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Mais quel pauvre cadre, quels pauvres costumes ! Sûrement ces acteurs jouent avec leur vêtement ordinaire. Et le domestique qui passe sur la scène, l’agent de police, installé à côté du premier rôle… Ce soir justement, il y a un numéro exceptionnel des danseuses du palais, ce qui a attiré au théâtre une foule avide de ce spectacle nouveau. Les voici les petites poupées, avec leur coiffure en faux cheveux, leurs fausses manches qui descendent jusqu’à leurs pieds. Au moins là, il y a de la couleur, une certaine élégance. L’orchestre est aussi plus original, moins barbare que celui des sourds de tout à l’heure. Elles ne sont guère intimidées, les petites kissans, et elles lancent à leurs amis des œillades incendiaires, au moment de disparaître derrière le rideau.

C’est la fin du spectacle, et tout le monde se précipite vers la sortie, pour voir le départ en chaise à porteurs des danseuses.

Je regagne tranquillement ma demeure à pied, Seoul n’offrant pas aux noctambules les cabarets de nuit, les soupers après le théâtre. J’admire le beau ciel étoilé et la lune éclatante. Elle éclaire brillamment la route, me dispensant du fanal indispensable par les nuits sombres, pour éviter les casse-cou, les ponceaux croulants auxquels il manque parfois une ou deux dalles ; les mares qui remplissent, après la pluie, toutes les dépressions du chemin ; les blocs de pierre entreposés n’importe où, sur la chaussée, par des charretiers plus brutes que leurs bœufs et nullement surveillés par la police.

Une patrouille, vêtue de casaques rouges et de képis à bande blanche, marche silencieusement