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En voici d’autres, employés de ministères, plus modestes, vêtus d’irréprochables vêtements blancs, et qui se contentent, pour manifester leur supériorité de « yang-bane », des grosses lunettes à monture en écaille, dont les glaces sont en cristal de roche enfumé ; quelques-unes de ces lunettes ont bien dix centimètres de diamètre : ils ne doivent rien voir à cause de l’obscurité de la salle. Peu importe, l’orgueil est satisfait, et les commis, les petits marchands qui ont donné quelques sous pour entrer, regardent avec des yeux d’envie ces fonctionnaires, minaudant, pirouettant et s’interpellant d’un bout de la salle à l’autre. Ils vont, viennent, laissant flotter leur robe de soie, heureux de l’effet qu’ils produisent. Le théâtre est, autant pour eux que pour les acteurs ou les acrobates, un lieu où ils peuvent se faire remarquer.

Les rangs inférieurs sont plus tranquilles, plus modestes. Voilà une brave femme, couverte de son manteau vert, qui se faufile timidement à une place vide, et, ne sachant pas que la banquette est faite pour s’asseoir, s’installe commodément par terre, sur le plancher.

Comme elle est au premier rang, elle ne perdra pas une note de la délicate musique de tout à l’heure.

Chacun fume, va, vient, impatient de voir les fameuses danses réservées jusqu’à présent au palais.

Mais voici l’orchestre qui fait son apparition ; c’est le premier numéro de la soirée !

— « Ah ! c’est ça l’orchestre coréen ? me dit un soir un compatriote de passage à Seoul, après avoir entendu les premières notes des cymbales, du tambourin et des flûtes. Mais ils viennent de la Côte d’Ivoire, vos musiciens !