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en 1779 le drame de Nathan le Sage, son chef-d’œuvre. Lessing s’était beaucoup occupé de religion ; il excita de grands troubles parmi les théologiens par ses Fragments d’un inconnu (1774), où il exprime des doutes hardis, et par la publication d’un ouvrage de Bérenger de Tours en Réponse aux attaques de Lanfranc, qu’il avait découvert dans la bibliothèque de Wolfenbuttel. Il prit également place parmi les philosophes par son livre de l’Éducation du genre humain. Cet écrivain, qui est en quelque sorte le Diderot de l’Allemagne, est un des principaux auteurs du mouvement littéraire imprimé à ce pays depuis 1750. Ses Œuvres complètes ont été publiées à Berlin en 30 vol. in-8, 1771-94, et 1796-1808. Ses meilleures pièces ont été trad. par M. de Barante dans les Chefs-d’œuvre des théâtres étrangers, 1822.

LESSIUS (Léonard), casuiste, de l’ordre des Jésuites, né à Brecht près d’Anvers, en 1554, mort en 1623, étudia à Rome sous Suarez, enseigna la philosophie et la théologie à Douai, puis à Louvain, et excita de vives disputes par sa morale facile et par ses opinions sur la prédestination et la grâce : il fut censuré par la Faculté de Louvain en 1587. On a de lui : De justitia ; De licito usu æquivocationum et mentalium restrictionum ; De gratia efficaci ; De prædestinatione. Ses Œuvres ont été publiées à Anvers, 1625-30, 2 vol. in-fol.

LESTINES ou LEPTINES, bg de Belgique (Hainaut), à 20 kil. S. O. de Charleroi. Anc. palais des rois d’Austrasie. Il s’y tint en 743 un concile pour la réforme du clergé et pour la restitution des biens ecclésiastiques usurpés par Charles-Martel. Carloman et Pépin, fils de Charles, consentirent à cette restitution.

LESTOCQ (J. HERMANN, comte), né en 1692 à Zell (Hanovre), mort en 1767, était fils d’un chirurgien français protestant, qui s’était expatrié. Il apprit la médecine, se rendit à St-Pétersbourg pour y exercer son art, parvint à se faire nommer chirurgien de la princesse Élisabeth (depuis impératrice), eut occasion plusieurs fois de lui montrer sa fidélité, même au péril de sa vie, et réussit à la placer sur le trône, en 1741. Il fut alors nommé premier médecin de l’impératrice, conseiller intime, et jouit d’un grand crédit ; mais deux ennemis puissants, Bestucheff et le comte Apraxine, réussirent, par la calomnie, à le perdre dans l’esprit d’Élisabeth : elle le fit arrêter et enfermer dans une forteresse, d’où il ne sortit qu’à l’avénement de Pierre III (1760).

LESTOILE (P. de). V. ÉTOILE.

LESTRYGONS, peuple qui, selon la Fable, habitait la Sicile orientale (vers Catane et Léontium), était voisin des Cyclopes. On en fait des géants et des anthropophages. Ulysse aborda chez ce peuple inhospitalier et y perdit plusieurs de ses compagnons, qui furent dévorés par les habitants. On attribuait aux Lestrygons la fondation de Formies en Campanie.

LESUEUR (Eustache), le Raphaël français, peintre célèbre, né à Paris en 1617, étudia sous Vouet, et se fit de bonne heure remarquer du Poussin. Il ne chercha point à s’introduire à la cour et ne peignit que pour des particuliers et des couvents. Persécuté par des envieux et dégoûté du monde par la perte de sa femme, il se retira dans un cloître de Chartreux ; il y mourut en 1655, n’étant âgé que de 38 ans. Lesueur est le premier peintre de l’école française sous Louis XIV : Lebrun, son rival, est loin de l’égaler pour la grâce, la vigueur, la noblesse et l’art de disposer un sujet. Son Œuvre, gravé au trait et publié par Landon en 110 pièces (Paris, 1811), n’est pas complet. Ses tableaux les plus importants sont : la Vie de S. Bruno, en 22 tableaux, pour le couvent des Chartreux (auj. au musée du Louvre) ; l’Histoire de S. Martin et celle de S. Benoît ; S. Paul guérissant les malades devant Néron ; S. Paul prêchant à Éphèse ; la Salutation angélique ; le Martyre de S. Laurent ; S. Gervais et S. Protais ; Tobie donnant des instructions à son fils ; le Salon des Muses, en 19 tableaux, qu’il peignit à hôtel Lambert, en même temps que Lebrun peignait la galerie du même hôtel. On doit à M. Vitet une remarquable Étude sur Lesueur (1843).

LESUEUR (J. F.), célèbre compositeur, né près d’Abbeville en 1763, m. en 1837, obtint à 23 ans la maîtrise de la métropole de Paris, et fut plus tard attaché au Conservatoire comme professeur et inspecteur. Il donna en 1793 à l’Opéra comique la Caverne, Télémaque et Paul et Virginie ; en 1804 au grand Opéra les Bardes, son chef-d’œuvre ; en 1809 la Mort d’Adam, etc. « Dans la Caverne, dit Choron, sa musique est forte et nerveuse ; dans Télémaque, mélodieuse et fantastique ; dans Paul et Virginie, fraîche et sentimentale ; dans les Bardes, brillante, héroïque et vraiment ossianique ; dans la Mort d’Adam, simple, énergique et solennelle. » On doit encore à Lesueur un nombre considérable de messes, d’oratorios, etc. Abbeville lui a élevé une statue en 1852. Raoul Rochette a lu à l’Institut en 1839 une Notice sur Lesueur.

LESUIRE (R. M.), littérateur, né en 1737 à Rouen, m. à Paris en 1815, fut lecteur du duc de Parme et professeur de législation à l’École centrale de Moulins. On a de lui des poésies : Épître à Voltaire, 1761 ; la Vestale Clodia à Titus, héroïde, 1767 ; le Nouveau monde, poëme en 26 chants, 1782 ; Isaac et Rébecca, poëme en prose, 1777 ; et des romans : l’Aventurier, 1782 ; le Philosophe parvenu, 1788, etc.

LESUR (Ch. Louis), né à Guise en 1770, m. en 1849, fut quelque temps employé sous Talleyrand au ministère des affaires extérieures, remplit jusqu’en 1825 les fonctions d’inspecteur de la loterie, et passa ses dernières années dans sa ville natale. On lui doit plusieurs ouvrages justement estimés (Progrès de la puissance russe, 1807 ; Histoire des Cosaques, 1814, etc.) ; mais il est surtout connu comme fondateur et rédacteur de l’Annuaire historique, qu’il commença en 1818 et poursuivit jusqu’en 1832 : cet ouvrage, continué depuis par A. Fouquier, est un précieux répertoire de documents et un manuel indispensable pour ceux qui s’occupent d’affaires publiques.

LESURQUES (Joseph), né à Douai en 1763, d’une famille honorable et aisée, fut condamné à mort en 1796 comme coupable d’un assassinat commis sur la personne du courrier de Lyon. Peu après on découvrit le vrai coupable, nommé Dubosc, qui fut aussi condamné par le même tribunal : la singulière ressemblance du malheureux Lesurques avec l’assassin avait été cause d’une fatale méprise. Quoique l’erreur judiciaire soit reconnue de tous, la famille de Lesurques n’a pu encore obtenir la réhabilitation juridique de sa mémoire, malgré les persévérants efforts de M. Méquillet, tuteur de ses derniers rejetons.

LESZSKO, ducs ou rois de Pologne. V. LECK.

LE TELLIER (Michel), homme d’État, né en 1603, m. en 1685, était fils d’un conseiller à la Cour des aides, et dut son élévation à Mazarin. Nommé, par le crédit du cardinal, secrétaire d’État de la guerre (1643), il contribua puissamment à terminer les troubles de la régence et à rétablir l’autorité royale ; il résigna en 1666 les fonctions de ministre de la guerre en faveur de son fils aîné, le célèbre Louvois, et reçut les sceaux en 1677. D’un zèle ardent pour l’orthodoxie, il fut un des principaux instigateurs de la révocation de l’édit de Nantes, et scella peu avant sa mort l’ordonnance de révocation. Bossuet et Fléchier ont prononcé son oraison funèbre. — Son fils puîné, Ch. Maurice Le Tellier, archevêque de Reims (1671), présida l’assemblée générale du clergé en 1700. Il légua à l’abbaye de Ste-Geneviève sa bibliothèque, qui contenait 50 000 vol.

LE TELLIER (le P. Michel), le dernier confesseur de Louis XIV, né à Vire en 1643, était fils d’un paysan, Il entra chez les Jésuites en 1661, professa les humanités et la philosophie, rédigea dans l’intérêt de son ordre plusieurs écrits polémiques, et fut élevé à la dignité de provincial. Chargé en 1709, après le P. Lachaise, de diriger la conscience du roi, il déploya dans ces fonctions un zèle âpre et inflexible : il fit poursuivre les Jansénistes à outrance, fit détruire