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bliothécaire de lord Spencer. Il débuta par une Introduction à la connaissance des éditions rares et précieuses des classiques grecs et latins, 1802; donna en 1809 Bibliomania ou la Folie des livres, en 1810 et années suivantes les Antiquités bibliographiques, en 1815 Bibliotheca Spenceriana, magnifique catalogue de la collection confiée à sa garde, en 1817 le Décaméron bibliographique, où l'on trouve les renseignements les plus curieux sur la calligraphie, la peinture des manuscrits, les origines de l'imprimerie, la reliure et l'ornementation des livres; en 1821 un Voyage bibliographique en France, en Allemagne, etc., 3 vol. grand in-8, exécuté avec un grand luxe (la partie qui concerne la France a été trad. par Liquet et G. A. Crapelet, 1825). Ses ouvrages abondent en documents intéressants et sont écrits d'un style piquant et original; mais l'auteur est quelquefois tombé dans de fâcheuses excentricités et dans des erreurs qui sont l'effet d'un examen superficiel.

DIBUTADE, potier de Sicyone ou de Corinthe, qui vivait à une époque incertaine, mais fort reculée. Sa fille ayant imaginé de tracer l'ombre de son amant, dont le profil était dessiné sur une muraille par la lumière d'une lampe, ce fut là, dit-on, l'origine de la peinture. Le père appliqua de l'argile sur ces mêmes traits en observant leurs contours, et fit cuire ce profil de terre : ce fut là l'origine de la sculpture en relief.

DICÉARQUE, disciple d'Aristote, de Messine en Sicile, ou plutôt de Messène en Péloponèse, fut à la fois philosophe, historien, géographe, et fleurit vers l'an 320 av. J.-C. Il avait écrit, sous le titre de Corinthiaques et de Lesbiaques, des dialogues où il traitait de l'âme et où il soutenait que la matière a par elle-même la faculté de sentir et que l'âme n'est qu'une force vitale naturelle au corps. Il avait aussi composé une histoire de Sparte qu'on lisait tous les ans en public à Sparte même pour l'instruction de la jeunesse. Cicéron, Varron et Pline le citent avec honneur. Il ne reste de lui que des fragments d'un ouvrage sur la Grèce, que l'on trouve dans les Petits Géographes grecs et dans les Historic. græc. fragmenta de la Bibliothèque grecque de Didot, 1848.

DICQUEMARE (l'abbé J. Franç.), naturaliste, né au Havre en 1733, enseigna la physique et l'histoire naturelle dans cette ville, et y mourut en 1789. Il a fait de nombreuses observations sur les animaux marins sans vertèbres, particulièrement sur les orties de mer, les actinies ou anémones de mer, les poulpes, les huîtres, etc., que l'on trouve consignées ans le Journal de Physique, 1772-89. Il s'occupa aussi d'astronomie et de géographie, inventa un cosmoplane pour résoudre les problèmes d'astronomie nautique et publia la Connaissance de l'astronomie mise à la portée de tout le monde, 1771.

DICTAMNUM, v. de Crète. V. DICTYNNA.

DICTATEUR, magistrat extraordinaire que l'on investissait à Rome de l'autorité suprême dans les moments difficiles, surtout dans les cas urgents de guerre. Il était nommé par les consuls. La durée de son commandement était de 6 mois au plus. A l'exception des tribuns du peuple, tous les autres magistrats étaient suspendus pendant cet espace de temps. Il nommait pour commander la cavalerie sous ses ordres un lieutenant qu'on appelait le maître de la cavalerie (magister equitum). Il marchait précédé de 24 licteurs, faisait la paix et la guerre et avait droit de vie et de mort, sans appel au peuple. Il ne pouvait toutefois disposer des deniers publics sans l'autorisation du peuple, ni s'éloigner de l'Italie, et il rendait compte de sa gestion à l'instant où il sortait de charge. La dictature fut créée l'an 498 av. J.-C., sur la proposition de T. Lartius, qui en fut le premier revêtu. Primitivement, les patriciens seuls exercèrent cette magistrature, mais ensuite les plébéiens l'obtinrent (356 av. J.-C.). Parmi les plus célèbres dictateurs on cite Cincinnatus, Camille, Papirius; Sylla (82) et César (48-44) en furent les derniers revêtus; ils se firent nommer dictateurs perpétuels, titre qui équivalait à celui de roi. La dictature fut abolie avec la république, ou plutôt les empereurs ne furent de fait que des dictateurs perpétuels.

DICTYNNA ou DICTAMNUM, v., promontoire et mont. de Crète, au N. O. L'herbe merveilleuse appelée dictamne y croissait en abondance. Pour cette herbe, V. DICTAMNE au Dict. univ. des Sciences.

DICTYS de Crète, l'un des compagnons d'Idoménée au siége de Troie. On a donné son nom à l'auteur inconnu d'une Hist. de la guerre de Troie en 6 livres. On conte qu'à son retour de Troie le compagnon d'Idoménée écrivit en phénicien l'histoire du siége, que son ouvrage fut mis avec lui dans son tombeau, et qu'il y resta jusqu'au règne de Néron, époque à laquelle il aurait été découvert par l'effet d'un tremblement de terre, et traduit en grec, puis en latin. Toutes ces circonstances sont autant de fables : l’Histoire de Dictys, que nous n'avons auj. qu'en latin, paraît avoir été traduite ou fabriquée au IIIe ou au IVe s. par un certain Q. Septimius. Quelques-uns prétendent même que le texte latin ne remonte pas au delà du XVIe s. Cet ouvrage, qui du reste n'est pas sans intérêt, fut imprimé pour la 1re fois vers 1477; il est généralement joint à Darès de Phrygie. Dederich en a publié à Bonn, en 1833, une édition séparée. Il a été trad. en français par Achaintre, 1813.

DICUIL, géographe irlandais du IXe siècle, était un moine sorti de Luxeuil. Il a composé un traité De Mensura Orbis, publié par Walckenaër, Paris, 1807 (texte seul), et par Letronne en 1814, avec de savants commentaires. Cet ouvrage a permis de fixer l'époque de la découverte de l'Islande et des îles Féroé, et celle de la rupture du canal entre le Nil et la mer Rouge.

DIDEROT (Denis), philosophe du XVIIIe siècle, né à Langres en 1712, mort en 1784, était fils d'un coutelier. Destiné à l'état ecclésiastique, il fut envoyé à Paris pour étudier en théologie, puis il entra chez un procureur; mais n'ayant de goût que pour les sciences et les lettres, il renonça à prendre un état, et se livra tout entier à l'étude, embrassant tout à la fois littérature, métaphysique, morale, physique, géométrie. Il se mit en même temps à donner des leçons et à faire des livres pour vivre. Il débuta par des traductions de l'anglais; il publia en 1745 un Essai sur le mérite et la vertu, imité de Shaftesbury ; en 1746, des Pensées philosophiques, qui commencèrent à attirer sur lui l'attention, et qui furent condamnées au feu par le parlement; en 1749, la Lettre sur les aveugles, à l'usage de ceux qui voient, qui renfermait quelques paradoxes impies et quelques allusions hardies à des personnages puissants, ce qui le fit enfermer à Vincennes. Devenu libre, il conçut le projet de l’Encyclopédie, et s'étant associé d'Alembert et quelques autres gens de lettres, il réussit, à travers mille obstacles que lui suscitaient le clergé et l'autorité civile, à mettre à fin cette grande entreprise (1751-72, 28 vol. in-fol., savoir, 17 de texte et 11 de planches). Il s'y réserva les articles sur la philosophie ancienne et ceux sur les arts et métiers, et les traita avec un talent supérieur. En même temps, il composait divers ouvrages, les uns sérieux, tels que les Pensées sur l’interprétation de la nature, 1754, inspirées par le Novum Organum de Bacon; les autres frivoles, tels que Jacques le Fataliste, la Religieuse, romans licencieux qui déshonorèrent sa plume; il donnait deux drames, le Fils naturel, 1757, et le Père de Famille, 1758, pièces d'un genre tout nouveau; il faisait connaître et goûter Richardson; il jugeait dans ses Salons les ouvrages de peinture exposés en 1765 et 1767. Cependant, tous ces travaux ne l'enrichissaient pas, et il se vit réduit en 1765 à vendre sa bibliothèque : l'impératrice de Russie, Catherine II, qui favorisait les philosophes, l'acheta 50 000 francs, à la condition qu'il continuerait d'en jouir, et dès ce moment elle se chargea de pourvoir à ses besoins. En 1773, Diderot